Ophélie (1), 30 ans, mère de deux enfants, est battue par son mari depuis des années. Et son médecin de famille le sait. Il y a quelques semaines, «elle est arrivée avec le nez brisé et a failli perdre son œil», raconte le praticien réunionnais, qui a souhaité rester anonyme. L’époux violent et jaloux harcèle sa femme, jusqu’à l’appeler en pleine consultation. «Il l’insulte, lui donne des coups de poing, poursuit le docteur, impuissant. Elle ne veut pas porter plainte, elle a trop peur que son mari ne la tue.» Alors la patiente repart chez elle en clopinant, son médecin de famille priant pour qu’il ne lui arrive rien de pire. Pourquoi ne signale-t-il pas son cas ? Il estime que le secret médical et «la relation de confiance» l’emportent sur toute autre considération.
Pourtant, depuis un an, la loi autorise les professionnels de santé à prévenir les autorités lorsque les coups mettent la vie de la victime «en danger immédiat» et que celle-ci se trouve «sous l’emprise de son auteur». Le médecin doit s’efforcer d’obtenir l’accord de la patiente ; s’il n’y parvient pas, il doit signaler son cas au procureur de la République. L’article 226-14 du code pénal, réprimant la violation du secret professionnel, ne s’appliquera pas.