Il aura fallu des mois avant que la justice ne soit saisie. Selon une enquête publiée ce lundi 11 décembre par le journal Sud Ouest, une discussion Instagram entre étudiants de Science-Po Bordeaux a débordé de propos «racistes», «antisémites» et «négrophobes». Certains susceptibles de tomber sous le coup de la loi comme «les juifs ont droit à une douche dans leur vie».
L’histoire débute l’été dernier au moment où tombent les résultats d’admission à l’IEP Bordeaux, 284 étudiants sont autorisés à faire leur entrée en première année. Certains s’en vantent sur les réseaux sociaux, notamment sur TikTok. «Les algorithmes prennent le relais et mettent en relation d’autres élèves qui rejoindront Sciences-Po Bordeaux à la rentrée. Dans l’euphorie de la nouvelle, les jeunes devenus amis par la magie d’Internet créent un groupe de discussion Instagram», peut-on lire dans Sud Ouest.
Cette étape marque le début d’un déferlement de violences verbales, qui va «pourrir l’ambiance» de la rentrée 2023 des premières années, selon Samuel Quach, président du «bureau des arts», l’association chargée de la partie culturelle de la vie étudiante à l’IEP. «Cela allait de la blague de mauvais goût à des propos qui relèvent d’un racisme profond, explique à Sud Ouest Dominique Darbon, le directeur de Sciences-Po Bordeaux. À un moment donné, la dynamique a échappé à beaucoup avec des déclarations très problématiques, de nature antisémite, négrophobes…».
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Au sein des 2 600 étudiants, informations et indignation circulent rapidement. Certains dénoncent, d’autres ont même l’idée d’intégrer le groupe Instagram dans le but d’y mettre fin. Les auteurs de ces saillies ont fini «par se dénoncer, à demi-mot, réalisant être allés trop loin», ajoute Sud Ouest, mais selon le journal, le Bureau des arts n’a saisi la cellule de veille contre les discriminations que le 24 novembre. Les enseignants finissent, eux, par se tourner vers leur direction qui se tourne vers le rectorat pour l’ouverture d’une enquête administrative fin novembre. Et la semaine dernière, l’ensemble du dossier est transmis au directeur de Sciences-Po, qui en informe le procureur de la République.
Sciences-Po n’en est pas à sa première affaire. Le Bureau des arts le rappelle dans un post Facebook : «Sciences Porcs a démarré il y a deux ans, et nous refusons catégoriquement de penser que ce mouvement de libération de la parole n’a eu aucun impact sur les pratiques et les modes d’intégration de l’école.» En février 2021, Libération publiait notamment une enquête sur l’établissement bordelais : une dizaine d’étudiantes, victimes d’agressions sexuelles ou de viols, y témoignaient.
Mise à jour le 11 décembre avec précision sur les fonctions du Bureau des arts ainsi que sur la circulation du dossier entres les enseignants, la direction et la justice.