Nicolas (1) a-t-il été une victime collatérale du climat de peur qui régnait à Bétharram ? Pour Nathalie (1), sa sœur, le doute s’installe depuis que les témoignages d’agressions physiques et sexuelles d’anciens élèves s’empilent. Le 12 juin 1980, son petit frère est mort à l’âge de 12 ans d’une méningite foudroyante après avoir passé toute une nuit de fièvre dans l’un des dortoirs de l’établissement catholique situé près de Pau (Pyrénées-Atlantiques). En enquêtant sur son décès, Nathalie a récemment découvert des manquements qui ont pu retarder la prise en charge médicale de l’enfant, comme elle le révèle ce jeudi 24 avril au Monde. Les faits sont aujourd’hui prescrits, mais elle prévoit tout de même de porter plainte pour non-assistance à personne en danger, afin que l’histoire de Nicolas «soit rajoutée à cet ensemble d’horreurs».
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Jean-Rémy Arruyer, ancien élève du collège alors âgé de 16 ans, livre au quotidien sa version de la nuit du drame. A l’époque, il est élève-surveillant d’un dortoir d’enfants de CM2 et de 6e. Ce soir-là, un camarade l’alerte qu’un «petit ne va pas bien du tout». Il s’agit de Nicolas que les deux adolescents découvrent alors dans son lit, pâle, les lèvres violacées et en plein accès de fièvre. Lorsqu’ils lui parlent, l’enfant ne répond pas. Jean-Rémy Arruyer et son ami se mettent alors en quête d’un adulte dans les couloirs afin de prévenir un médecin. Problème : ils ne trouvent personne. L’espace de quelques instants, le duo songe à prévenir un surveillant. Mais très vite, ils y renoncent. A Bétharram, le climat de peur est tel qu’ils craignent des représailles.
Un cas de grippe
Ce n’est que le lendemain aux alentours de 7 heures que le petit garçon est envoyé à l’infirmerie. L’infirmière aurait alors d’abord pensé à un cas de grippe. Lorsque le médecin arrive - en fin de journée - l’élève toujours inconscient est finalement envoyé à l’hôpital. Il y décédera aux alentours de 22 heures.
Dans cette affaire, les responsables de Bétharram balaient toute responsabilité. Auprès de la famille, ils racontent à l’époque que Nicolas s’est réveillé avec des maux de tête et dans un état grippal. Rien de vraiment alarmant. Le père de l’enfant est un ancien de la maison, dont il garde un bon souvenir. En confiance avec la congrégation, les proches ne posent donc pas plus de questions.
Le soir du drame Jean-Rémy Arruyer, qui était également victime d’agressions sexuelles dans l’établissement, annonce de son côté à sa mère ne plus jamais vouloir retourner dans le collège. D’après le Monde, il finira par occulter cet épisode traumatique, qui le tiraillera malgré tout inconsciemment pendant des années. Il ne parviendra à «reconstituer le puzzle» que 45 ans plus tard.
(1) Certains prénoms ont été modifiés.