Menu
Libération
Forme olympique

Gouvernement Attal : Amélie Oudéa-Castéra empoche l’Education et les JO, les syndicats d’enseignants craignent une ministre à mi-temps

Le gouvernement Attaldossier
L’ancienne tenniswoman ajoute à ses précédentes attributions de ministre des Sports celle de ministre de l’Education nationale. Une promotion express qui interroge les organisations enseignantes, alors qu’elle risque d’être accaparée par la préparation des Jeux de Paris 2024.
Amélie Oudéa-Castéra, ministre des Sports et de l'Education. (Frédéric Stucin/Libération)
publié le 11 janvier 2024 à 20h27

«Dans trois ans, plus personne ne parlera d’elle», déclarait Bernard Laporte jeudi dans les colonnes du Midi libre. C’est peu dire que l’ancien patron du rugby français n’a pas eu le nez creux à propos d’Amélie Oudéa-Castéra, qui l’avait poussé il y a un an à démissionner de son poste de président de la Fédération française de rugby après sa condamnation à deux ans de prison avec sursis, notamment pour corruption passive – il a fait appel.

Du pain sur la planche

Inconnue du grand public à son entrée au gouvernement en mai 2022 au poste de ministre des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, la voilà désormais à la tête d’un super ministère : Oudéa-Castéra ajoute à ses précédentes attributions l’Education nationale, ainsi que la Jeunesse. Ce qui désespère les syndicats enseignants, déjà très remontés par le départ de Gabriel Attal, après seulement cinq mois rue de Grenelle : «On vit une crise sans précédent et on va avoir une ministre à mi-temps ? interroge Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, premier syndicat du secondaire. C’est révélateur de la façon dont est traitée l’Education nationale.»

Car si Jean-Michel Blanquer a bien hérité un temps des deux portefeuilles de l’Education nationale et des Sports, la période était tout autre. «Pendant six mois, [Amélie Oudéa-Castéra] sera sur les Jeux olympiques et on n’aura pas d’interlocutrice pour parler de nos conditions de travail, de l’inclusion des élèves handicapés, des salaires», déplore Guislaine David, porte-parole du Snuipp-FSU, syndicat majoritaire chez les enseignants de primaire. D’autant, dit-elle, «qu’on est en pleine préparation de la rentrée scolaire de septembre 2024». Et qu’il y aura du pain sur la planche avec la feuille de route déjà fixée par Gabriel Attal, qui a présenté en décembre son «choc des savoirs» avec une révision des programmes en primaire et, au collège, le retour au redoublement, les classes de niveaux ou le brevet qui deviendra dès la rentrée 2024 indispensable pour entrer au lycée.

«Il faudra qu’Attal lui reconnaisse toute sa place»

Amélie Oudéa-Castéra, 45 ans, ancien grand espoir du tennis féminin au début des années 90, «n’a pas de connaissances spécifiques sur l’éducation nationale, avertit Guislaine David. Il faut attendre la nomination de son cabinet, c’est essentiel parce qu’on a besoin de gens compétents, sinon on ne va pas s’en sortir». «Le centre de gravité de l’Education nationale n’est de toute façon plus rue de Grenelle mais du côté de Matignon et de l’Elysée», complète Sophie Vénétitay, alors que Gabriel Attal a déclaré après sa nomination vouloir emmener la «cause de l’école» avec lui. «Il va falloir que Gabriel Attal lui reconnaisse toute sa place, sa légitimité. Il ne faut pas qu’elle se retrouve à gérer le sport et lui l’Education nationale. Elle a l’air d’avoir le dialogue ouvert et d’être attachée à l’école. On verra si elle a les épaules ou pas», tempère Elisabeth Allain-Moreno, porte-parole du SE-Unsa.

Après avoir raccroché la raquette, la bosseuse et ambitieuse «AOC» a intégré Sciences-Po Paris, l’Essec et enfin l’ENA, dans la même promo qu’Emmanuel Macron. Puis a décroché la Cour des comptes où elle restera quatre ans, avant de rejoindre le privé, chez l’assurance Axa où elle passera dix ans, à gravir les échelons. En 2017, elle a participé à la campagne de Macron, espérant décrocher le ministère des Sports. Après avoir (provisoirement) échoué, elle a finalement rebondi chez Carrefour. Deux gros postes dans le privé confortablement rémunérés, qui lui valaient d’être jusqu’alors la deuxième membre du gouvernement la plus riche, avec un patrimoine de plus de 6 millions d’euros.