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Libération
Reportage

Au rassemblement en hommage à Dominique Bernard, Arras «uni et debout»

Près de 5 000 personnes se sont retrouvées place des Héros ce dimanche pour commémorer le professeur de français tué vendredi. Les enseignants y étaient nombreux, eux qui trois ans après Samuel Paty pleurent à nouveau l’un des leurs.
Lors du rassemblement hommage sur la place des Héros d'Arras, ce dimanche 15 octobre, après l'attentat de vendredi contre le lycée Gambetta. (Stéphane Dubromel/Hans Lucas.Libération)
publié le 15 octobre 2023 à 14h24

Le carillon du Beffroi a d’abord résonné, avec sa douce mélodie. Puis les sirènes (celle du mercredi midi), trois fois de suite. L’émotion prenait aux tripes, ce dimanche 15 octobre, sur la place des Héros, à Arras (Pas-de-Calais), pour l’hommage à Dominique Bernard, le professeur de français tué lors d’une attaque terroriste dans son lycée deux jours plus tôt. «Il n’y a pas de mot pour apaiser», a dit le maire, Frédéric Leturque.

Une enseignante représentant l’intersyndicale éducation Nord-Pas-de-Calais, a, la première, pris la parole : «Il est insupportable de revivre le même effroi trois ans après Samuel Paty. Que l’école soit à nouveau la cible. L’école qui fait grandir nos enfants. L’Etat doit prendre toutes les mesures.» Le maire a, lui, insisté sur sa «fierté» de voir Arras «rassemblé, uni et debout». Il a répété plusieurs fois ces trois mots. «Arras est à l’épreuve mais vous êtes debout. Tout le monde fait face. Nous faisons bloc ensemble. Personne ne nous prendra notre confiance. Je ne reculerai pas. Je ne plierai pas.» Il a remercié les Arrageois pour leur présence, nombreuse. La place était remplie. 5 000 personnes, selon la préfecture.

A gauche de la place, beaucoup de visages en pleurs, des embrassades, sans mots. Des enseignants. «On est une petite communauté, on se connaît tous. On a besoin de se retrouver entre nous», glisse Isabelle derrière ses lunettes, avant de se détourner.

Des roses blanches

Sur la place, réchauffée par une belle lumière, peu avant midi se sont organisées des grandes files pour déposer des fleurs sur la plaque apposée au mur du Beffroi après les attentats de Paris du 13 novembre 2015. Des roses blanches pour la plupart.

Julie, 16 ans et sa mère, Veronic, ont préféré un tournesol, «parce qu’il est tourné vers le soleil, pour retrouver la lumière», et deux œillets orange, «pour la couleur orange qui réchauffe». Ce matin, au réveil, elles se sont lancées toutes les deux dans la construction de la statue de la Liberté en Lego, l’occasion de se pencher sur son histoire. «Son vrai nom, c’est “la statue éclairant le monde”. C’est important, le lendemain d’une telle épreuve, de se replonger dans l’histoire et les symboles.»

Depuis l’instant où elle a serré le bras de sa fille, à la sortie de son lycée vendredi, Veronic cogite. Samedi, elle est allée d’un pas rapide à la librairie du centre-ville. «Un lieu de recueillement pour Dominique Bernard, qui était un homme de lettres. Son visage était connu là-bas.» La libraire a trouvé des mots pour l’apaiser. Elle est repartie avec deux éditions différentes d’un même livre. Un pour sa fille, l’autre pour elle. L’Homme qui plantait des arbres, de Jean Giono.