Il est 13 heures passées de quelques minutes lorsque la grande double porte rouge du lycée Victor-Hugo dans le IIIe arrondissement de Paris s’ouvre devant une bonne trentaine de lycéens. Tous fusent en direction de sept feuilles A4 en train d’être scotchées au mur en brique de l’établissement, sous une plaque en mémoire des enfants juifs du quartier, déportés pendant de la Seconde Guerre mondiale. Lorsqu’il s’agit de qualifier d’un mot cette journée rythmée par un double résultat scolaire et électoral, Ferdinand et Hector hésitent. «Soulagement» pour l’un, «satisfaisant» pour l’autre.
«Je n’étais confiant ni pour le bac ni pour les législatives, relate Hector dans un timide sourire. Je suis content que le RN ne se classe que troisième dans ces élections, mais la majorité n’est pas énorme à gauche ?» Du haut de ses 17 ans, il n’a pas pu voter, mais aurait «bien aimé», étant «très NFP». Il n’empêche, ce lundi 8 juillet, le jeune homme peut souffler. Il rafle une mention «très bien» avec 17 de moyenne générale et la gauche unie l’a emporté. Direction les vacances en famille dans le Sud, proche de Toulouse.
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«Je suis trop refaite, lâche de son côté Alice. On peut partir en vacances tranquilles, quand on reviendra, la France sera toujours là.» La jeune fille décroche, elle aussi, la mention «très bien». Après avoir passé l’année à plancher ses épreuves de spécialités en Histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques (HGGSP) et Sciences économiques et sociales (SES), elle se prépare à aller étudier à Lyon pour un double diplôme en langues et relations internationales.
«La jeunesse s’est réveillée, ça fait plaisir»
Au milieu de l’agitation, les cris se mêlent les uns aux autres : «Les gars ! Personne n’a raté son bac dans la classe !» Ils s’accompagnent de pleurs de joie et de tristesse. Lucy essuie ses larmes du bout des doigts. Elle avait prévenu : «Si je suis aux rattrapages, je me casse maintenant pour réviser.» Il lui manque seulement quelques points pour décrocher le diplôme. Au niveau national, le taux de réussite annoncé ce lundi par le ministère de l’Education nationale est de 85,5 %.
Bac
Dans le brouhaha, les considérations politiques reviennent vite. Simon, un peu déçu par sa mention «assez bien», se fait très sérieux quand il évoque la composition de la nouvelle Assemblée nationale. «Je suis plutôt rassuré, on avait peur. Je ne pensais pas du tout que le NFP allait faire ces scores, explique le lycéen, néanmoins sur la réserve. Je vois que tout le monde est très content, mais pour moi, ça ne fait que retarder l’arrivée du RN au pouvoir. Les prochaines semaines vont être compliquées, il va y avoir des tensions pour le pouvoir et les seuls qui puissent en profiter, c’est l’extrême droite.»
Assise sur les garde-corps face au lycée, Salomé, elle, décrit «une journée forte en émotions». Son bac en poche et le NFP arrivé en tête des législatives, «c’est un soulagement». «La jeunesse s’est réveillée, ça fait plaisir. On ne va pas retrouver dans la France de Pétain, c’est rassurant», exulte la jeune fille, glissant au passage un gentil tacle à son amie Inaya, qui n’a fait «que dormir toute l’année» mais vient de décrocher son bac STMG avec 11,45 de moyenne. «De savoir qu’on ne va pas être gouvernés par des psychopathes, on va passer un bon été», conclut Salomé.