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Education nationale

Charge de travail, salaires, considération : l’école au bord de l’écœurement selon le baromètre SE-Unsa

A la veille de la rentrée, le baromètre du syndicat SE-Unsa sonne l’alarme. Plus de 40 000 répondants décrivent une école qui tient encore debout mais au prix de la santé de son personnel, d’un déclassement salarial et d’un manque de moyens criant.
Dans une classe d'école primaire, à Loudenvielle, en mars 2024. (Lageat Perroteau/Hans Lucas. AFP)
publié aujourd'hui à 10h11

Chaque rentrée, le baromètre du Syndicat des enseignants-Unsa ausculte l’état des troupes de l’éducation nationale, enseignants, conseillers principaux d’éducation (CPE), psychologues scolaires ou assistants d’éducation (AED). Plus de 40 000 répondants cette année et un constat qui se répète : l’attachement au métier résiste mais pas les conditions pour l’exercer. Plus de sept enseignants sur dix disent ne pas se sentir respectés, un sur deux juge ses conditions de travail insatisfaisantes et plus d’un tiers envisage une reconversion. Au cœur du malaise, une santé mentale et physique fragilisée par une charge de travail jugée écrasante et des missions en perpétuel changement. «Le personnel est le moteur de tout le système éducatif, mais il est aujourd’hui écœuré», résume la secrétaire générale Elisabeth Allain-Moreno.

Le baromètre ne décrit pas une profession en rupture avec son travail. Neuf sur dix disent aimer leur métier, et sept sur dix aiment encore l’exercer au quotidien. Mais, paradoxalement, plus des trois quarts ne le conseilleraient pas à un jeune. En cause, les salaires jugés trop bas par une immense majorité, l’avalanche de réformes et surtout le manque de moyens, considérés comme le premier problème qui mine l’école aujourd’hui. Conséquence directe, deux tiers estiment que l’image de leur profession s’est dégradée.

Déclassement économique

A cela s’ajoute le déclassement économique. En vingt ans, les enseignants, CPE et psychologues de l’éducation nationale ont perdu environ un quart de leur pouvoir d’achat. Quant aux revalorisations promises pour les enseignants, elles ont surtout ciblé les débuts de carrière, laissant de côté la majorité en milieu de parcours. Résultat, près de neuf personnels de l’éducation sur dix disent connaître une forme de précarité. Et les comparaisons internationales sont sans appel, un enseignant français avec quinze ans d’ancienneté gagne 16 % de moins que la moyenne de l’OCDE, deux fois moins qu’en Allemagne, pour un temps d’enseignement supérieur.

Le SE-Unsa souligne aussi le sort des professions les plus précaires des 142 000 accompagnantes d’élèves en situation de handicap (AESH) et 50 000 assistants d’éducation (AED). Ensemble, ils forment désormais le deuxième corps le plus nombreux de l’éducation nationale. Tous sont payés au minimum de la fonction publique. Pour les AESH, cela signifie entre 910 et 1 000 euros nets par mois, la plupart n’étant pas employés à temps complet.

«Les missions changent en permanence»

Le malaise dépasse la question du salaire. Près d’un personnel sur deux se dit écrasé par la charge de travail, plus de la moitié évoque un stress au travail, et quatre sur dix peinent à concilier vie professionnelle et vie personnelle. «Les missions changent en permanence, elles n’ont plus rien à voir avec ce qu’imaginaient les enseignants en entrant dans le métier», déplore Elisabeth Allain-Moreno.

Les enseignants réclament de la formation continue, mais n’en reçoivent presque pas. Deux jours par an dans le premier degré, 1,6 dans le second, quand les autres agents de catégorie A de la fonction publique bénéficient de plus de neuf jours, et la moyenne de l’OCDE atteint huit jours. La moitié des personnels jugent que les formations proposées ne répondent pas à leurs besoins, notamment pour la gestion de la diversité des élèves et l’usage du numérique.

Les inquiétudes s’aiguisent d’autant plus que le plan d’économies, confirmé par le Premier ministre François Bayrou lundi 25 septembre, prévoit la suppression de 3 000 postes de fonctionnaires dès 2026 et le non-remplacement d’un départ à la retraite sur trois à partir de 2027. Un calendrier qui laisse redouter de nouveaux coups portés à une école déjà exsangue. A moins que la possible chute du gouvernement ne change radicalement la donne, ce qui est peu probable.