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Libération
Pénurie

Education nationale : plus de 1 500 postes de professeurs des écoles non pourvus aux concours

Les syndicats s’inquiètent du «déficit alarmant» de profs du premier degré, en particulier dans les deux plus grandes académies de France, Créteil et Versailles, qui n’attirent pas les candidats. En cause notamment, le niveau de vie trop élevé et le temps passé dans les transports.
(Xose Bouzas/Hans Lucas)
publié le 18 juin 2024 à 16h22

Des résultats qui confirment la crise systémique que traverse la profession. A ce stade, plus de 1 500 postes n’ont pas été pourvus cette année aux concours de professeurs des écoles, selon des chiffres relayés par des syndicats, qui alertent sur une «pénurie durable». A la différence des enseignants des collèges et lycées, l’examen se passe dans les différentes académies, et pas au niveau national. Ainsi, les candidats choisissent a priori où ils souhaitent exercer leur métier. Conséquence, les académies de Versailles, Créteil et de Guyane, traditionnellement déficitaires, sont particulièrement touchées. «Le déficit est alarmant et augmente d’année en année, déplore Guislaine David, cosecrétaire générale du FSU-SnuiPP, principal syndicat du premier degré (écoles maternelle et élémentaire). Le métier n’attire plus, surtout depuis la pandémie de Covid-19.»

Guislaine David justifie cette pénurie par des conditions d’exercice plus difficiles dans ces deux académies parisiennes : «Le temps passé dans les transports est généralement long et les loyers sont élevés, alors que le salaire est le même pour un professeur en début de carrière, quelle que soit son académie. Ce qui explique que l’académie de Rennes soit par exemple beaucoup plus attractive que celle de Créteil.»

Créteil, Versailles et la Guyane en déficit

D’après les chiffres accessibles sur la plateforme Cyclades du ministère de l’Education nationale, ce sont 1 539 postes qui n’ont pas été pourvus (hors Mayotte) sur 9 885 offerts (hors Polynésie, mais avec Mayotte). Le nombre de postes vacants est plus ou moins similaire à celui de l’année passée (1 533).

Dans le détail, pour le seul concours externe de professeurs des écoles (le principal), 6 846 postes ont été pourvus sur 7 917 offerts, détaille la FSU-SnuiPP. Le syndicat précise que les chiffres donnés ne comptabilisent pas ceux de Mayotte, ni ceux de concours supplémentaires des académies de Créteil et de Versailles, les deux plus grandes de France, qui ne sont pas encore connus. «Cette année encore, la perte se concentre sur les académies de Créteil et Versailles, déficitaires depuis très longtemps. On n’arrive pas à enrayer cette crise», a réagi Guislaine David, secrétaire générale de ce syndicat.

Selon les chiffres compilés par la FSU-SnuiPP, 670 postes n’ont pas été pourvus à Créteil, 692 à Versailles et 174 en Guyane. «Toutes les académies sauf trois pourvoient l’intégralité des postes offerts», fait valoir le ministère de l’Education nationale, pour qui «il y a une problématique spécifique aux académies de Créteil et de Versailles et une situation très particulière en Guyane». «On n’est pas très surpris, mais par contre, à nouveau très inquiets», a pour sa part commenté Elisabeth Allain-Moreno, secrétaire générale du syndicat SE Unsa.

Inquiétudes

«Le fameux choc d’attractivité qu’on nous a promis il y a quelques années n’existe toujours pas», renchérit de son côté Jérôme Sinot, secrétaire national de la CGT Educ’action en charge du premier degré. «On est surtout inquiets de ce qui va advenir à la fois pour les élèves à la rentrée, parce qu’il va manquer du monde dans les classes, et pour les équipes pédagogiques parce qu’il va aussi manquer du monde dans les écoles.» Dans un rapport publié en février 2023, la Cour des comptes énumérait par ailleurs les facteurs responsables de la perte d’attractivité du métier : dégradation de l’image de la profession, rémunération peu élevée, conditions de travail difficiles.

Il y a deux ans, le recrutement d’enseignants (premier et second degrés confondus) avait connu une crise inédite, avec plus de 4 000 postes non pourvus au total, provoquant l’émoi dans le monde de l’éducation. L’an dernier, c’est plus de 3 100 postes qui n’avaient pas été pourvus, dont 1 315 dans le premier degré, selon des chiffres publiés début juillet par le ministère de l’Education.