Coup de pression sur l’un des plus gros groupes d’enseignement privé français. Après leur rendez-vous avec le président du groupe Galileo Marc-François Mignot, les ministres de l’Education et de l’Enseignement supérieur, lundi 10 mars, Elisabeth Borne et Philippe Baptiste, ont annoncé qu’une inspection interministérielle serait missionnée «pour une plus grande transparence du fonctionnement des établissements d’enseignement supérieur privés à but lucratif». Les deux ministres ont indiqué par ailleurs travailler avec la ministre du Travail Astrid Panosyan-Bouvet sur un «renforcement du dispositif Qualiopi qui conditionne l’obtention des financements de l’apprentissage».
«Accueillir trop d’étudiants, réduire les coûts pédagogiques au seul motif de générer du profit, c’est en effet compromettre la qualité de l’enseignement, ne pas offrir les mêmes conditions de réussite aux jeunes», avait souligné le ministre de l’Enseignement supérieur aux Echos. Il a aussi déclaré vouloir clarifier l’environnement de ce secteur, alors que plus de 25 % des étudiants suivent aujourd’hui leur formation dans des établissements privés, en majorité à but lucratif.
Récit
Galileo global education se présente comme le «leader mondial de l’enseignement supérieur», avec quelque 300 000 étudiants dans une soixantaine d’établissements. Le nom du groupe, aux mains de fonds d’investissement, est peu connu, mais les écoles qu’ils rachètent, elles, le sont : le Cours Florent, l’Atelier de Sèvres, Penninghen ou Paris School of Business (PSB). Galileo est aussi entré il y a deux ans dans le capital de la prestigieuse école de management l’EM Lyon, comme le documentait Libération.
Cette annonce des ministres intervient après la parution du livre Le Cube (ed. Flammarion), sur les pratiques de ce puissant groupe. Dans son livre, la journaliste Claire Marchal décrit la surcharge des classes, des enseignements pas à la hauteur, des salaires en baisse, et des frais d’inscription très élevés. Mercredi dans Les Echos, le groupe a réagi, considérant que livre repose sur des témoignages essentiellement «anonymes».
«Connaissance lacunaire des pouvoirs publics»
Galileo, aux finances et à la structure jugées opaques, a déjà fait l’objet ces dernières années d’enquêtes journalistiques, fustigeant les mêmes travers, alors qu’il est largement financé par des aides d’Etat, à commencer par les milliards d’euros d’argent public pour soutenir l’apprentissage. A l’époque, l’ancienne ministre Sylvie Retailleau avait promis de remettre de l’ordre avec la mise en place d’un label de qualité pour aider les familles à s’y retrouver, oubliant de préciser… que les critères de ce label seraient élaborés en collaboration avec les gros groupes.
En avril 2024, une mission d’information parlementaire, des anciennes députées Estelle Folest (Modem) et Béatrice Descamps (Libertés, indépendants), insistait sur «l’angle mort» que représente le secteur privé lucratif, «caractérisé par une connaissance lacunaire des pouvoirs publics et un cadre juridique obsolète.» A la mi-février, le député de Paris Emmanuel Grégoire (PS) a déposé à l’Assemblée nationale une proposition de loi visant à «un meilleur encadrement de l’enseignement supérieur à but lucratif» pour «protéger les étudiants».
Mise à jour à 21h05 avec les annonces d’Elisabeth Borne et Philippe Baptiste.