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Libération

«Islamo-gauchisme» : les propos indignes de Frédérique Vidal

«Islamo-gauchisme», la polémiquedossier
La sortie de Frédérique Vidal, qui plus est alors que l’université est en souffrance, n’est pas digne de sa fonction.
La ministre de l'Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, en 2018. (Albert FACELLY/Photo Albert Facelly pour Libér)
publié le 17 février 2021 à 20h29

Frédérique Vidal est-elle bien à sa place au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ? Ce n’est pas la première fois que la question se pose, tant l’ex-présidente d’université est coutumière des bourdes ou petites phrases explosives. Alors que l’université souffre de la pandémie, qui la force à organiser des cours à distance, que les étudiants peinent à trouver un sens à leurs études faute de contacts humains et d’horizon, que certains se retrouvent contraints d’avoir recours à l’aide alimentaire, la ministre préfère s’inquiéter de l’«islamo-gauchisme» qui, selon elle, «gangrène» les universités. Passons sur le fait qu’elle ait proféré cette attaque sur cette caisse de résonance de l’extrême droite qu’est devenue CNews. Ses propos sont si décalés par rapport aux drames quotidiens des étudiants qu’ils ne sont pas dignes de la fonction. La très policée Conférence des présidents d’université (CPU) l’a d’ailleurs appelée à «élever le débat». On a vu plus respectueux. Entendons-nous bien : qu’il y ait depuis les attentats de 2015 un clivage de plus en plus marqué parmi les universitaires et les intellectuels, entre ceux qui s’inquiètent de ces territoires conquis par l’islamisme et l’indigénisme, et ceux qui souhaitent élargir les travaux de recherche au postcolonialisme ainsi qu’aux inégalités de race et de genre, est exact. Et que la querelle entre universalistes et intersectionnels déborde de l’université et clive la classe politique, notamment à gauche, notamment sur la question de l’islam, est une évidence. Mais le rôle d’une ministre de l’Enseignement supérieur est-il d’hystériser le débat et de s’ériger en police politique de la recherche et des débats universitaires ? Evidemment non. Il reste que les propos de Vidal, qui suivent de peu la prestation très sécuritaire et droitière de Gérald Darmanin face à Marine Le Pen, s’inscrivent dans un climat. Même s’il a semblé désavouer sa ministre, Emmanuel Macron est bel et bien parti en campagne et sa cible n’est pas la gauche.