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Libération
Reportage

Mobilisation des étudiants pour Gaza : au Panthéon, «il faudrait que l’on soit des dizaines de milliers pour qu’il se passe réellement quelque chose»

Plusieurs centaines de manifestants se sont réunis vendredi 3 mai à Paris sur la place du Panthéon, quelques heures après l’évacuation de Sciences-Po Paris, en soutien au peuple palestinien.
Des étudiants devant le Panthéon, le 3 mai à Paris. (Benoit Tessier/Reuters)
par Enora Foricher
publié le 3 mai 2024 à 20h44

Sur la place du Panthéon, des manifestants affluent en ce vendredi 3 mai, keffieh blanc et noir, rouge ou vert, autour du cou pour nombre d’entre eux. Le rendez-vous était donné à 14 heures, pour un rassemblement pacifique. Mot d’ordre : «Pour le peuple palestinien, non à la répression et à la fermeture des facs.» Parmi les signataires de l’appel à manifester, on retrouve des syndicats étudiants tels que l’Union étudiante, l’Unef et le Poing levé, ainsi que les organisations de jeunesse de partis politiques comme La France insoumise, le Parti communiste ou les Ecologistes. Leurs drapeaux se mêlent à celui de la Palestine.

«Soutenir Gaza n’est pas antisémite»

Plusieurs touristes, dont des groupes scolaires, venus visiter le Panthéon, regardent, curieux, le rassemblement se mettre en place. Parmi eux, un père de famille est accompagné de ses deux filles adolescentes et de son jeune fils, qu’il porte sur ses épaules. Tariq et sa famille vivent en Roumanie et sont en vacances à Paris, et en passant, ils ont reconnu des chants propalestiniens. Si Tariq ne va pas habituellement manifester, il lui semble aujourd’hui évident d’apporter son soutien. «C’est un génocide qui se déroule sous nos yeux, dit-il. Nous sommes tous humains, c’est normal de soutenir le peuple palestinien.»

Les étudiants se placent derrière les banderoles de leurs différents campus, dont Tolbiac, Nanterre, ENS-Ulm ou encore la Sorbonne. Face aux caméras et micros de nombreux médias, dont beaucoup étrangers, ils entonnent avec vigueur des chants propalestiniens. «Viva Palestina», «Israël assassin, Macron complice» ou «Nous sommes tous des enfants de Gaza» se succèdent. Quelques pancartes se dressent. Sur l’une d’entre elles, on peut lire : «Soutenir Gaza n’est pas antisémite.» Un slogan partagé par Morgane Tagachoucht, 22 ans, étudiante en troisième année de double licence Histoire-Histoire de l’art et archéologie à la Sorbonne. «Les voix qui s’élèvent contre le génocide en Palestine le feraient pour n’importe quel autre massacre dans le monde. Taxer d’antisémites les mouvements propalestiniens, c’est silencier les personnes juives qui ne soutiennent évidemment pas toutes la politique coloniale d’Israël.»

«Le rapport de force politique est inégalitaire»

Ce vendredi après-midi, les plusieurs centaines de manifestants ne sont pas tous étudiants. Comme Manu, animateur socio-culturel de 35 ans. Habitué des réseaux militants, il juge trop faible la mobilisation pour la Palestine et espère une prise de conscience plus importante. «Le seul moyen que la France cesse de soutenir la politique d’Israël, c’est de faire pression sur le gouvernement.» Enzo (1), étudiant en licence d’Histoire à la Sorbonne, est moins convaincu. «Pour le moment, le rapport de force politique est inégalitaire, il faudrait que l’on soit des dizaines de milliers pour qu’il se passe réellement quelque chose, et c’est loin d’être le cas.» Pourquoi est-il présent aujourd’hui ? Il souhaite que les images des mobilisations parviennent aux Palestiniens. Pour qu’ils voient le soutien qui leur est apporté.

Ailleurs en France, comme au Havre, à Dijon, à Reims ou à Poitiers, plusieurs Instituts d’études politiques ont été le théâtre de perturbations, blocages ou occupations partielles, dont certaines ont été levées. A Lyon, les forces de l’ordre sont intervenues pour évacuer dans le calme des manifestants propalestiniens de l’IEP, et l’établissement restera fermé jusqu’au 12 mai. A Saint-Etienne, la police est également intervenue pour évacuer une quinzaine d’étudiants qui bloquaient l’accès à un site universitaire. Le campus de Sciences-Po Menton, spécialisé dans la géopolitique du Moyen-Orient, a quant à lui rouvert après plusieurs jours de fermeture.

(1) Le prénom a été modifié.