Un cri : «Tahia Palestine.» La voix éraillée d’une jeune femme, au visage masqué par un keffieh, vient briser la minute de silence faite en hommage aux Palestiniens. Devant Sciences-Po Paris, ils étaient plusieurs dizaines à s’être rassemblés ce mardi 7 mai pour réaffirmer leur détermination à poursuivre le mouvement étudiant qui a commencé il y a quelques semaines.
Ce matin, une vingtaine d’étudiants a tenté de bloquer l’établissement, à l’aide de poubelles et de vélos en libre-service. Au deuxième jour des examens, alors que les cours sont par ailleurs terminés depuis vendredi, les étudiants pouvaient tout de même entrer par une porte annexe. Sur place dès 7 heures, les manifestants ont été évacués par les forces de l’ordre moins de deux heures après le début de leur action. Deux d’entre eux ont été interpellés et placés en garde à vue.
«Aujourd’hui, vous êtes les étoiles»
Un rassemblement, à 12 heures, était particulièrement attendu et a été suivi par une centaine de manifestants, principalement des étudiants issus de Sciences-Po. Doigts en V, keffiehs autour du cou et drapeaux palestiniens brandis ou portés sur leurs épaules, ces derniers ont entonné plusieurs slogans pro-palestiniens. Nombre d’entre eux avaient également imprimé une photographie d’un de leurs camarades interpellés, réclamant leur libération.
Reportage
Sur place, le député de La France insoumise Louis Boyard a tenu à féliciter les étudiants mobilisés. «Vous êtes la fierté de la France. […] La lutte est difficile mais une phrase dit que plus la nuit est noire, plus les étoiles brillent. Aujourd’hui, vous êtes les étoiles.» Interrogé à propos des accusations d’instrumentalisation du mouvement étudiant par LFI à l’approche des élections européennes, l’élu s’est défendu en invoquant une convergence naturelle liée à des revendications communes. «Je trouve cela injuste qu’il y ait des accusations d’instrumentalisation à chaque fois qu’un mouvement politique de la jeunesse émerge», a-t-il commenté.
Récupération politique «inévitable»
Vers 13 heures, plusieurs étudiants ont installé des tentes dans la rue Saint-Guillaume, incitant leurs camarades à s’asseoir pour un sit-in. La venue de François-Xavier Bellamy, eurodéputé Les Républicains, a perturbé l’ambiance pacifique, provoquant un face-à-face agité avec Louis Boyard. La tête de liste LR pour les élections euroépennes de juin a déclaré être venu apporter son soutien aux étudiants de Sciences-Po «souhaitant simplement passer leurs examens». Encadré par deux d’entre eux, il a poursuivi : «Sciences-Po n’appartient pas à l’extrême gauche. Il n’y a aucune raison d’étudier ici si c’est pour troubler l’ordre public.» Pour Victoria, étudiante en première année et membre du Comité Palestine, cette récupération politique est «inévitable». «Cela sert à visibiliser notre cause, à la porter à une échelle nationale voire internationale.»
Rejoints par une vingtaine d’étudiants de la Sorbonne, les manifestants ont néanmoins fini par être évacués, après avoir été sommés de se disperser boulevard Saint-Germain. Deux jeunes femmes ont été prises en charge à l’issue de l’évacuation, visiblement blessées aux chevilles dans le mouvement de foule. Un rassemblement est organisé à 17h30, place de la République à Paris par l’association Europalestine. Plusieurs étudiants ont appelé à s’y rendre dans un objectif de «massification» du mouvement.