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Non-remplacement de professeurs : l’Etat condamné en région parisienne pour des heures perdues par des élèves

L’Etat a été condamné pour les heures perdues par des élèves de l’académie de Versailles en raison du non-remplacement de professeurs, après des requêtes déposées par des parents d’élèves, annonce ce mercredi 10 avril le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.
(Patrick Batard/Hans Lucas)
publié le 10 avril 2024 à 15h05
(mis à jour le 10 avril 2024 à 16h38)

Leur action se voulait «symbolique». Des parents d’élèves de l’académie de Versailles, dont les enfants ont raté des dizaines d’heures de cours pendant leur scolarité, ont obtenu gain de cause, faisant condamner l’Etat pour les heures perdues en raison du non-remplacement de professeurs.

«Le tribunal a reconnu la responsabilité de l’Etat dans huit affaires et l’a condamné à indemniser les huit requérants des préjudices nés de la perte de chance de leurs enfants de réussir leurs années et cursus scolaires futurs en raison de la rupture de continuité pédagogique», a annoncé ce mercredi 10 avril le tribunal administratif de Cergy-Pontoise dans un communiqué.

Avocate de plusieurs familles, Me Delphine Krust explique à Libération avoir reçu ces décisions il y a une semaine. Elle se dit «satisfaite» que la responsabilité de l’Etat soit reconnue : «L’Etat sait très bien que son comportement est fautif. Et il ne peut même pas se réfugier derrière des normes imposées par le droit international ou européen : il s’impose lui-même un enseignement obligatoire pour les élèves. Ce sont des règles légitimes et nécessaires, pour éclairer et former les citoyens de demain, mais il ne les respecte pas. Et la situation empire depuis de très nombreuses années, alors même que les deux tiers des absences des professeurs sont prévisibles, et donc anticipables.»

«L’idée n’est pas de dépecer l’éducation nationale»

Pour l’avocate, les décisions sont importantes car elles actent les manquements de l’Etat à la fois dans le primaire et dans le secondaire. Pour autant, Me Delphine Krust ne se fait pas d’illusion : si les condamnations ont le mérite de «révéler une fois de plus que nous n’avons pas assez de professeurs», elles ne vont pas pour autant faire changer les choses du jour au lendemain tant le manque d’enseignants est important.

«De la sixième au deuxième trimestre de troisième, ma fille a eu 632 heures en moins, dont 105 heures en français, 86 heures en anglais, 75 heures en histoire-géo», avait détaillé lors de l’audience le 19 mars Sophie, l’une des mères d’élèves présentes, représentante de la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE). D’autres parents avaient témoigné des années scolaires à trous de leurs enfants, actuellement ou anciennement scolarisés à Villeneuve-la-Garenne (Hauts-de-Seine), Saint-Cloud (Hauts-de-Seine), Cormeilles-en-Parisis (Val-d’Oise) ou encore Cergy. Au nom du collectif #OnVeutDesProfs, des centaines de requêtes contre divers rectorats ont été déposées ces deux dernières années.

Les parents d’élèves qui ont fait condamner l’Etat ces derniers jours ont obtenu, pour leurs enfants, une indemnisation. Là où Me Delphine Krust demandait une indemnité symbolique d’un euro par heure de cours perdue - «l’idée n’est pas de dépecer l’éducation nationale mais de faire prendre conscience des manquements» -, ses clients ont finalement obtenu une indemnisation forfaitaire. Elle cite en exemple un élève qui avait perdu quelque 200 heures de cours au collège et qui a été indemnisé à hauteur de 150 euros.

Mise à jour à 16h30 : avec réaction avocate.