La contestation universitaire contre la guerre menée par l’armée israélienne dans la bande de Gaza prend de l’ampleur, sur fond de polémiques et d’interventions policières. A Paris, où les forces de l’ordre ont mis fin à plusieurs tentatives de blocus ces dernières heures, mais aussi à Saint-Etienne, à Grenoble ou à Toulouse, les étudiants se mobilisent, pas toujours en nombre, pour dénoncer l’opération israélienne, qualifiée de «génocide». Samedi, l’Union étudiante, premier syndicat dans les facs françaises, a appelé les étudiants «partout en France […] à se soulever contre la répression et pour la paix à Gaza», où plus de 34 000 Palestiniens ont été tués en l’espace de sept mois, selon le ministère de la Santé à Gaza, contrôlé par le Hamas. Libé fait le point sur l’état de la mobilisation dans le pays.
A Paris, une AG conséquente et l’espoir d’une convergence
Une assemblée générale à l’université de Tolbiac, dans le XIIIe arrondissement de Paris, a réuni ce mardi près de 500 étudiants, selon l’organisation trotskiste Révolution permanente, très présente dans les mouvements de contestation estudiantins. La direction de l’université a annoncé que le site avait été fermé en début d’après-midi «pour des raisons de sécurité». A Franceinfo, le Comité Palestine de la fac affirmait vers 15h30 que la direction «a enfermé les étudiants dans le campus» et que «plus d’un millier de personnes sont confinées à l’intérieur», ce que les mis en cause démentent. Sur les réseaux sociaux, des vidéos donnent à voir des étudiants qui patientent dans la fosse à l’entrée de l’université et scandent «Pour l’honneur de la Palestine et tous ceux qu’on assassine», sur l’air du «On est là» popularisé par les gilets jaunes.
🇵🇸 [DIRECT] "ON EST LA" CHANTENT LES ETUDIANT·ES A TOLBIAC
— Révolution Permanente (@RevPermanente) April 30, 2024
« Pour l'honneur de la Palestine et tous ceux qu'on assassine » scandent les étudiant•es dans la fosse de Tolbiac. Ils sont toujours enfermés dans la fac sur ordre de la direction. pic.twitter.com/sylnkHM6C8
Les événements de Tolbiac marquent un nouvel épisode de la mobilisation des étudiants parisiens, qui s’étend depuis une semaine. A Sciences Po, dans la nuit de mercredi à jeudi, il avait fallu l’intervention des CRS pour expulser la soixantaine de manifestants qui occupaient les lieux depuis quelques heures. Deux jours plus tard, à l’issue d’une nouvelle tentative de blocage, la direction avait accédé à plusieurs revendications des protestataires : la tenue d’une réunion publique sur la guerre dans l’enclave palestinienne et la «suspension des saisines de la section disciplinaires» engagées contre des étudiants ayant manifesté leur soutien à la Palestine. Puis, lundi, ce sont les étudiants mobilisés à la Sorbonne qui à leur tour ont été délogés par la police.
A Tolbiac, les participants visent une convergence des mouvements de protestation franciliens. Ce mardi, ils ont voté en faveur de l’organisation d’une assemblée générale interfacs, qu’ils souhaitent organiser jeudi soir. «La mobilisation s’est vraiment renforcée dans toutes les universités de France. Des AG ont eu lieu dans presque toutes les facs de la région parisienne», se réjouit auprès de Libération Mathis Aversenq, militant NPA Jeunes Révolutionnaires. «Il y a beaucoup de nouveaux venus, qui sont inspirés par ce qui se passe aux Etats-Unis», où les campus se mobilisent aussi en soutien à la cause palestinienne, ajoute-t-il.
Intervention policière à Saint-Etienne
A Saint-Etienne, ce mardi, la police a délogé des étudiants qui bloquaient depuis la veille le département des études politiques de l’Université Jean-Monnet. Les manifestants, une trentaine environ, n’ont pas opposé de résistance, ni commis de dégradation, selon les forces de l’ordre. Ils ont obtenu qu’une délégation soit reçue pour discuter avec le président de l’université dans le but d’organiser un débat sur la question palestinienne, ont expliqué leurs représentants. Lundi, les protestataires avaient reçu le soutien de la députée La France insoumise (LFI) de la Loire Andrée Taurinya, dont le parti souhaite un élargissement de la contestation étudiante.
Les IEP mobilisés
Dans la continuité des événements survenus à Sciences Po Paris, la semaine dernière, plusieurs Instituts d’Etudes politiques (IEP) ont été le théâtre ces dernières heures de manifestations ou de blocages. A Rennes, un «blocage filtrant» a été mis en place ce mardi dans la matinée par une cinquantaine d’étudiants. «L’Assemblée générale a investi les locaux de Sciences Po Rennes pour une durée indéterminée, en solidarité avec le peuple palestinien qui subit depuis octobre d’insupportables massacres, jugés par la Cour internationale de justice comme présentant un «risque plausible de génocide» en janvier dernier», ont expliqué les étudiants dans un communiqué.
Deux entrées de Sciences Po Strasbourg ont également été bloquées par les étudiants, tandis que dans la cour de l’IEP de Lyon quelque 150 personnes ont manifesté en «solidarité» avec la bande de Gaza, aux cris de «Palestine vivra, Palestine vaincra». A Toulouse, enfin, la direction a décidé de fermer l’établissement de manière préventive, par «obligation de sécurité», à partir de 16h30 ce mardi. Un rassemblement devait avoir lieu à 17 heures dans la cour de l’Institut.
Reportage
A Grenoble, un sit-in contre un partenariat avec une université israélienne
À Grenoble, une centaine d’étudiants ont participé à un «sit-in» sur les voies du tramway pendant une heure pour demander, notamment, la fin du partenariat noué en 2023 entre la faculté de Grenoble et l’Université du Néguev Ben-Gourion. Les étudiants ont scandé des slogans accusant l’Etat et les universités d’être «silencieux» et «complices» du «génocide en cours à Gaza». «Nous appelons à poursuivre le mouvement après ce qu’il s’est passé à Sciences Po Paris», a expliqué Robinson Rossi, président de l’Union étudiante de Grenoble.