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Education nationale

Parité dans la scolarité : Elisabeth Borne lance un plan «Filles et Maths»

La ministre de l’Education nationale souhaite attirer plus de filles dans les formations aux métiers d’ingénieur et du numérique. La réforme du lycée de Jean-Michel Blanquer en 2019 avait accentué l’écart entre le nombre de filles et de garçons dans les filières scientifiques.
Elisabeth Borne, le 28 avril à Paris. (Ian Langsdon /AFP)
publié le 6 mai 2025 à 20h47

«Prenez toute votre place, on a besoin de vous !» La ministre de l’Education nationale annonce ce mardi 6 mai dans les Echos que le gouvernement lance un plan «Filles et maths» afin d’attirer plus de jeunes femmes dans les formations aux métiers d’ingénieur et du numérique. «Il n’y a que 25 % de filles» qui s’engagent dans ces domaines, regrette Elisabeth Borne.

Selon la ministre, qui sera en déplacement mercredi matin dans un lycée de Courbevoie (Hauts-de-Seine) afin de faire le SAV de son annonce, cette proportion «stagne depuis le début des années 2000». «Le problème commence dès l’école primaire : à l’entrée en CP, le goût des filles pour les maths est équivalent à celui des garçons. Mais, dès la fin du premier trimestre, on constate un décrochage au détriment des filles et un écart qui ne cesse ensuite de se creuser durant toute la scolarité», déplore-t-elle. Ce constat est donc pénalisant «pour les filles» mais aussi «pour notre pays». «Il manque, par an, plus de 20 000 ingénieurs et 60 000 techniciens», souligne la ministre.

Une fille «consciencieuse» mais un garçon «brillant»

Ce nouveau plan ministériel met d’abord l’accent sur la sensibilisation et la formation des professeurs «dès la rentrée 2025 - du primaire au lycée». «On va mettre en place une sensibilisation de deux heures aux biais de genre, qui devra être réalisée avant le 15 septembre par les chefs d’établissement ou les directeurs d’école qui auront préalablement été formés.» Plus structurellement, le gouvernement doit également lancer, à partir de la rentrée, «un plan de formation pour prévenir les stéréotypes de genre dans l’apprentissage des mathématiques». «Nous nous inspirons d’une expérimentation menée dans l’académie d’Amiens, consistant à analyser les gestes pédagogiques.»

Il est également connu que les garçons lèvent davantage la main que les filles en cours de mathématiques. Suivant cette même logique genrée, sur le bulletin scolaire, une bonne élève est généralement décrite comme «consciencieuse», tandis que son équivalent masculin aura plus facilement tendance à être qualifié d’«élève brillant». «Nous afficherons dans toutes les salles des profs une charte rappelant les points de vigilance pour mieux prévenir la reproduction des stéréotypes.»

Ensuite, Elisabeth Borne souhaite «renforcer la place des filles dans les enseignements qui ouvrent vers ces filières d’ingénieur et du numérique» en demandant «aux chefs d’établissement et aux professeurs d’encourager les filles à choisir et conserver cette spécialité, et à prendre l’option maths expertes». L’objectif est d’avoir, d’ici à 2030, 30 000 filles de plus qui choisissent la spécialité maths en première et la conservent en terminale - pour passer de 42 % à 50 % de filles. «Et on veut une première marche dès la rentrée 2025, en augmentant par paliers de 5 000, chaque année, d’ici à 2030. Pour la rentrée 2025, les lycéens sont en train de faire leurs choix. On va demander aux chefs d’établissement de veiller à accompagner et convaincre les indécises.»

Interrogée sur une éventuelle fixation de quotas pour les classes préparatoires scientifiques, Elisabeth Borne se réfère au dernier rapport des inspections générales, qui préconise d’atteindre au moins 20 % de filles dans chaque classe préparatoire scientifique en 2026 et 30 % en 2030. La ministre dit reprendre cet objectif à son compte, sans jamais affirmer qu’il s’agira bel et bien de quotas.

Les stigmates de la réforme Blanquer

Si le constat de l’écart entre le nombre de filles et de garçons dans les filières scientifiques n’est pas nouveau, il ne faut pas oublier que la réforme du lycée promue puis mise en place par l’ancien ministre de l’Education nationale Jean-Michel Blanquer en 2019 a encore aggravé le phénomène. Comme constatait Mélanie Guenais, vice-présidente de la Société mathématique de France, dans une étude publiée le 7 mars 2024 dans le média universitaire The Conversation, en valeur absolue, le nombre de bachelières scientifiques est retombé au niveau d’il y a quarante ans.

Après la réforme, qui rendait la pratique des mathématiques optionnelle à partir de la première, la part de bacheliers garçons choisissant une filière scientifique a également chuté, mais dans des proportions bien moindres que celle des bachelières. Résultat, une proportion deux fois et demie plus importante de garçons que de filles intègrent une filière scientifique, alors qu’ils n’étaient qu’une fois et demie de plus avant la réforme.