Les polytechniciens ne lâchent pas leur direction. Les membres du conseil d’administration de «l’X» ont reçu, samedi 6 avril, une lettre ouverte signée par 600 étudiants, anciens et personnels, intitulée «L’École polytechnique doit se transformer en profondeur pour agir en vue d’une société juste et respectueuse de l’environnement». Le sujet a été débattu lors du comité exécutif de l’établissement ce lundi 8 avril. Un épisode de plus dans la mobilisation des étudiants pour climat qui remonte à 2018, et a repris de la vigueur après les confinements dus au Covid-19.
«L’identité de l’École polytechnique a été fondée comme une réponse aux grands défis d’intérêt général. À ce titre, les questions sociales et environnementales doivent devenir la colonne vertébrale de l’École pour les années à venir, aussi bien au niveau des formations que de la recherche. L’École doit devenir porte-parole des centaines de milliers de scientifiques qui alertent depuis des décennies sur la dangerosité de notre trajectoire», lit-on dans la missive que Libération a pu consulter.
Les auteurs formulent quatre recommandations. La première concerne l’enseignement. Pour eux, cette école d’ingénierie doit «penser le changement au-delà de la seule perspective de l’innovation technologique» et les problématiques environnementales doivent être intégrées dans «chaque enseignement». Les étudiants demandent aussi à l’école d’arrêter les partenariats avec les entreprises investissant dans des nouveaux projets d’extraction fossiles appelés «bombes climatiques». BNP Paribas, TotalEnergies, Crédit Agricole, Société Générale, ou encore Amundi sont citées. Ils réclament également la transparence sur la gestion de l’école, la formation des personnels aux problématiques des transitions écologiques et un «aménagement du campus en cohérence avec l’objectif défini par la loi de zéro artificialisation nette des sols».
A lire aussi
Ce n’est pas la première fois que des étudiants de l’X se mobilisent pour climat et l’environnement. En 2022, l’école n’avait pas échappé au mouvement de discours contestaires prononcés par des étudiants venus chercher leur diplôme à la tribune, initié par les «agro qui birfurquent» d’AgroParisTech. LVMH et Total ont dû renoncer à installer un centre de recherche sur le campus de l’école en raison d’une opposition farouche de plusieurs étudiants et anciens. C’est aussi sur le campus de Saclay de l’école qu’est né le collectif Pour un réveil écologique, encore actif auprès des entreprises et ministères, notamment pour plaider l’évolution de l’enseignement supérieur.
Contactée par Libération, la direction dit avoir «un dialogue nourri et permanent avec [ses] élèves qui ne manquent pas de challenger de manière constructive» sur les questions environnementales. A l’école polytechnique comme ailleurs, l’évolution des maquettes pédagogiques passe par la mobilisation des premiers concernés. «Un certain nombre d’actions sont déjà mises en œuvre au sein de la formation et de nombreuses recherches sont tournées vers la transition énergétique», plaide encore l’école qui se dit «confiante» sur l’issue de ce «dialogue». En revanche, la direction se montre intransigeante sur le point des partenariats. «Les entreprises citées participent aussi à la transition énergétique et à la souveraineté de la France et de l’Europe», nous écrit-elle. Patrick Pouyanné, le PDG de TotalEnergies, a d’ailleurs vu son siège renouvelé au conseil d’administration de l’Ecole, en décembre dernier. Les débats ne sont donc pas finis.