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Libération
Reportage

Prévention des rixes au collège : «Vous allez dire quoi à vos parents ? On l’a tué parce qu’il a marché dans notre quartier ?»

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Fort de son expérience personnelle, Adama Camara sensibilise les jeunes aux risques des violences entre quartiers, avec une méthode à mille lieues de celle prônée par le gouvernement, axée sur la répression.
Le 13 mai au collège Jean-Lurçat de Ris-Orangis, Adama Camara anime un atelier de prévention des rixes. (Cyril Zannettacci/Vu pour Libération)
publié le 23 mai 2024 à 20h44

Adama Camara change de casquette. «On va dire que j’ai 14 ans, je marche dans votre quartier, je te regarde. Tu vas faire quoi ?» Les mains dans le dos, le président de l’association Sada déambule dans une vaste pièce du collège Jean-Lurçat de Ris-Orangis (Essonne) en fixant un ado. Il le chauffe. Fait venir d’autres élèves. Ça part en baston (fictive). «Je suis sur lui en train de le taper, qu’est-ce qui se passe ?» demande Adama Camara. «Moi, je filme !» réplique un garçon du tac au tac. Ça parle cou attrapé, patate dans la tête, penalty. «Je suis par terre, je bouge plus, qu’est-ce qui se passe ?» relance l’intervenant. «Je mets un dernier coup, après je pars.»

Dans la salle de cet établissement classé en réseau d’éducation prioritaire (REP), une cinquantaine d’élèves de 3e assistent en silence à l’impro. «Quelques jours après, vous apprenez que la personne que vous avez tapée a perdu la vie.» Ceux qui ont pris part au passage à tabac, âgés de 13 à 15 ans, atterrissent en garde à vue puis sont déférés au parquet. «Le juge décide de les envoyer en prison pour meurtre. A 15 ans, ils vont en prison ou pas ? Dans une cellule de 9 mètres carrés. Levez la main si vous pensez que oui.» Seuls deux bras s’élèvent. Il renouvelle la question : et à 14 ans ? Et à 13 ans ? «A partir de 13 ans, on est responsable pénalement. Si vous commettez un crime, le juge peut vous envoyer en prison, la vraie vraie prison. Beaucoup ne le savent pa