Une nouvelle soirée tendue à Sciences-Po. Dans la nuit de mercredi à ce jeudi 25 avril, les forces de l’ordre sont intervenues dans le campus situé 1, rue Saint-Thomas pour évacuer le site occupé par quelques dizaines d’étudiants qui y tenaient un rassemblement propalestinien. Cette mobilisation a été organisée par le Comité Palestine de l’école, déjà à l’origine de plusieurs mobilisations depuis le début de la guerre entre le Hamas et Israël, et soutenu par certains syndicats.
«L’occupation a été décidée après une après-midi de débats et d’échanges dans Sciences Po, et en réaction à une répression croissante à l’égard des étudiants propalestiniens de la part de la direction», raconte à Libé une étudiante sous couvert d’anonymat. Selon elle, la direction entretient un dialogue «tendu» avec les étudiants propalestiniens et «refuse d’entendre leurs revendications». Cette étudiante en veut pour exemple la saisine, la semaine dernière, de la commission disciplinaire de Sciences Po par l’administration après une mobilisation «pacifique» à l’intérieur de l’établissement.
Mercredi en fin de journée, des tentes ont donc été installées dans la cour du campus de la rue Saint-Thomas par une grosse centaine d’étudiants. Parmi leurs revendications : qu’une réunion ouverte avec la direction soit organisée, que l’école enquête sur les partenariats qu’elle peut entretenir avec des universités et entreprises israéliennes «suspectées de participer à perpétration de l’oppression systémique du peuple palestinien» ou encore qu’une «une veillée /minute de silence en mémoire aux innocent.e.s tué.e.s par Israël depuis le 8 octobre» soit organisée, selon un communiqué transmis par le Comité Palestine à Libération.
La direction dénonce «un fort climat de tensions», l’Union étudiante une «répression policière sans précédent»
Du côté de la direction, on explique que la mobilisation des étudiants a provoqué «un fort climat de tensions pour les étudiants, les enseignants et les salariés» de l’école. «Après échange avec la direction de Sciences-Po, la plupart ont accepté de quitter les lieux» mais «un petit groupe d’étudiants a néanmoins refusé et il a été décidé que les forces de l’ordre procèdent à l’évacuation du site», raconte-t-elle dans un communiqué. La direction de l’établissement «regrette que les nombreuses tentatives de dialogue afin qu’ils quittent les lieux dans le calme n’aient pas permis de trouver une autre issue à cette situation». Selon la préfecture de police, une dizaine de tentes avaient été installées dans la cour de ce campus. A l’arrivée de la police, «50 étudiants ont quitté d’eux-mêmes les lieux, 70 ont été évacués dans le calme à partir de 0H20» et la police «a quitté les lieux à 1H30, aucun incident à déplorer».
🔴 ALERTE : la direction de Sciences Po fait intervenir les CRS au sein de l’école pour expulser les étudiant•es qui occupent pour dénoncer le génocide à Gaza.
— La France Insoumise Sciences Po Paris (@LFi_SciencesPo) April 24, 2024
Soutien aux étudiant•es mobilisé•es. Ils ne feront pas taire les voix de la paix ! #ContreLaCensure pic.twitter.com/QTInTLVgXc
Chez les étudiants mobilisés, on dénonce la fermeté de l’administration et le recours aux forces de l’ordre pour évacuer les lieux. Dans un communiqué, l’Union étudiante parle d’une «répression policière sans précédent» qui est «à la fois choquante et préoccupante» : «Le rôle d’un directeur devrait être celui de protéger les étudiant.es et non de céder aux injonctions d’un gouvernement réactionnaire prêt à tout pour faire taire le camp de la paix. La volonté de ‘‘reprise en main’' de l’établissement, annoncée par Gabriel Attal devant le Conseil d’administration après la mobilisation du 12 mars, semble malheureusement déjà à l’œuvre.» Organisations propalestiniennes et syndicats appellent à un rassemblement ce jeudi midi devant le campus de Sciences Po rue Saint-Guillaume, dans le centre de Paris.
Un air de déjà-vu
Cette mobilisation génère une impression de déjà-vu : le 12 mars dernier, quelque 300 étudiants et militants propalestiniens avaient occupé un amphithéâtre de l’école, dans le cadre d’une «journée de mobilisation universitaire européenne pour la Palestine». Face à des accusations d’antisémitisme, la direction de l’école avait saisi le procureur de la République.
Le conflit à Gaza ne met pas sous tension les universités qu’en France. La semaine dernière, aux Etats-Unis, une centaine d’étudiants de l’Université Columbia ont été interpellés. Ils réclamaient la fin de la guerre qui ravage Gaza et le boycott par leur université de toute activité en lien avec Israël. La colère d’étudiants américains propalestiniens contre la guerre que mène Israël contre le Hamas dans la bande de Gaza a grossi mercredi, avec des face-à-face tendus avec la police au Texas, à New York, en Nouvelle-Angleterre et en Californie.
Mis à jour : à 11 h 55 avec la préfecture de police.