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Interview

Temps scolaire : «Les vacances d’été, c’est un temps fondamental pour les enfants»

Lors d’un déplacement à Marseille, Emmanuel Macron a expliqué ce mardi 27 juin qu’il fallait «repenser» le temps scolaire. Si le chef de l’Etat mise sur des vacances d’été raccourcies, le spécialiste des rythmes de l’enfant François Testu plaide pour revenir à la semaine de cinq jours.
Au deuxième jour de sa virée marseillaise, Emmanuel Macron en visite à l'école de Saint-André la Castellane, mardi 27 juin 2023. (Théo Giacometti/Hans Lucas pour Libération)
publié le 27 juin 2023 à 18h04

«On doit rouvrir un débat qui est celui du temps scolaire dans l’année, une des autres grandes hypocrisies françaises.» En déplacement à Marseille, le président Emmanuel Macron a affirmé ce mardi 27 juin qu’il voulait «repenser» les vacances d’été. «Quand on a des vacances de trois mois, l’inégalité revient», a-t-il insisté avant de déplorer qu’on «bourre les semaines de nos enfants, qui arrivent crevés tous les soirs». Pour François Testu, spécialiste des rythmes de l’enfant et professeur de psychologie à l’université François-Rabelais de Tours, la priorité est bien d’aménager le temps journalier des écoliers plutôt que de jouer sur la durée des vacances.

Faut-il revoir les deux mois de vacances d’été comme l’envisage le Président ?

Je ne pense pas qu’il faille raccourcir les vacances d’été, c’est un temps fondamental pour les enfants. Emmanuel Macron dit que certains enfants ont deux mois et demi, voire trois mois de vacances d’été, il exagère ! On peut éventuellement grignoter une semaine, mais pas plus. Par ailleurs, il faut respecter l’alternance des petites vacances de deux semaines toutes les six ou sept semaines maximum. Les enfants ont besoin de souffler, de faire une pause, sinon ils ne sont plus concentrés comme il faut sur leurs apprentissages.

Que pensez-vous du rythme scolaire actuel ?

Depuis que l’on est repassé à la semaine de quatre jours, sous la houlette de l’ancien ministre de l’Education Jean-Michel Blanquer, les journées des enfants sont bien trop chargées. Il faut absolument repasser à quatre jours et demi ou cinq jours pour étaler le temps scolaire sur la semaine, tout en faisant arriver les enfants plus tard le matin, laisser du temps de repos le midi et diminuer les activités l’après-midi. Pour les tout-petits, il ne faut pas attendre trop d’effort ni de résultats l’après-midi : il y a une véritable baisse de la concentration et de la vigilance. Dès 10-11 ans, on peut envisager une reprise d’activité, mais pas trop longtemps.

Ces nouvelles libertés n’impliquent pas que les enfants ne fassent rien, mais qu’on leur propose des activités périscolaires qui les sollicitent moins et que l’on respecte mieux leur sommeil. La complémentarité des temps scolaires et périscolaires doit être réfléchie pour donner une vie paisible à l’enfant et éviter le surmenage et la fatigue.

Pourquoi le débat sur le temps scolaire tourne en rond, sans nouvelles mesures significatives ?

Car l’enjeu tourne autour des intérêts matériels des adultes. Les parents travaillent et veulent quelqu’un pour s’occuper de leurs enfants. On nous fait croire que la semaine de quatre jours est pensée pour les enfants, mais je ne pense pas que ça soit le cas. Je suis surpris qu’Emmanuel Macron plaide pour des journées moins chargées alors que son ancien ministre de l’Education n’était pas du tout sur ces positions.

A Marseille, Emmanuel Macron a aussi parlé d’ouvrir les collèges de 8 heures à 18 heures dans les quartiers d’éducation prioritaire pour réduire les inégalités. Qu’en pensez-vous ?

C’est une bonne idée si c’est bien organisé. Sinon ce sera le flop. Si on ferme plus tard les collèges, il faut des personnes supplémentaires pour s’occuper des enfants et pouvoir proposer des activités qui complètent le temps scolaire. C’est très important pour l’égalité entre les élèves mais toutes les collectivités ne peuvent pas en organiser. Certains enfants rentrent chez eux après l’école, dans des familles qui n’ont parfois pas le temps de s’occuper d’eux ou qui ne leur donnent pas un encadrement digne de ce nom. C’est ça qui creuse les inégalités.