Le gouvernement va-t-il renoncer aux 4 000 suppressions de postes enseignants prévus pour la rentrée 2025 ? C’est en tout cas ce qu’espèrent les syndicats enseignants qui pourraient être fixés ce mardi 14 janvier 2025 lors du discours de politique générale de François Bayrou. «Je souhaite que mon ministère ait tous les moyens nécessaires, défendait la ministre de l’Education nationale, Elisabeth Borne, sur BFMTV le 5 janvier. C’est un enjeu sur lequel je me bats actuellement pour effectivement permettre d’avoir des postes d’enseignants à la hauteur de nos besoins.»
Les syndicats et l’ancienne Première ministre ne sont pas les seuls à ferrailler contre cette mesure, censée faire économiser 50 millions d’euros cette année et 150 millions par an ensuite. Les socialistes, qui négocient depuis plusieurs jours avec le gouvernement pour obtenir des modifications dans le projet de loi de finances (PLF) 2025 en échange de leur abstention lors du vote des prochaines motions de censure, l’ont glissée dans leur liste de courses. A l’automne, lors des débats budgétaires à l’Assemblée nationale, plusieurs groupes avaient déjà exprimé leur opposition à ces suppressions. LFI dénonçait une «saignée», le Rassemblement national jugeait «crucial de maintenir les effectifs enseignants», et même Ensemble pour la République demandait «moins de suppressions». Quant aux sénateurs, juste avant de suspendre les discussions en raison de la chute du gouvernement Barnier, ils avaient voté à l’unanimité la proposition des LR de revenir sur la moitié des suppressions prévues.
Emploi à taux zéro
Si 4 000 postes – principalement en maternelle et en élémentaire avec la suppression de 3 155 postes – sur un effectif total de 850 000 enseignants ne semblent pas peser lourd, la rue de Grenelle est pourtant soumise au régime le plus strict, endossant 90 % des baisses d’emplois de toute la fonction publique d’Etat. Le cabinet de la précédente ministre, Anne Genetet, avait assuré avoir sauvé les meubles du premier budget de l’Etat en mettant en avant l’argument démographique avec la baisse du nombre d’élèves «qui devrait s’accélérer avec 97 000 élèves en moins à la rentrée 2025» et la création de 2 000 postes d’accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH).
Comment Elisabeth Borne compte-t-elle revenir sur ce «sabordage de l’école publique» dénoncé par les syndicats enseignants ? En restant sur un schéma d’emploi à taux zéro dans le cadre de la loi spéciale votée le 20 décembre. Autrement dit, il n’y aurait donc ni suppressions ni créations de poste, mais un redéploiement du stock d’emplois de 2024 entre les académies en prenant en compte les évolutions démographiques. «Si Elisabeth Borne arrive à revenir sur ces suppressions, c’est quand même le signe qu’on a fini par être entendus et relayés politiquement, espère Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, premier syndicat du secondaire. Après, ça ne peut être que le point de départ de la reconstruction de tout le budget de l’éducation nationale sur plusieurs années. Dans le second degré, il faudrait créer un peu plus de 10 000 emplois pour retrouver le taux d’encadrement de 2017.»
«Vases communicants»
Techniquement, le ministère de l’Education nationale pourrait redéployer les postes entre le premier et le second degré. «L’an dernier, pour mettre en place les groupes de niveau au collège, ils ont créé des postes dans le second degré et en ont supprimé 650 dans les écoles, remarque Guislaine David, cosecrétaire nationale du SNuipp-FSU, premier syndicat du primaire. Ils peuvent donc faire ce même jeu de vases communicants cette année. Dans ce cas-là, ce ne sont pas seulement des classes mais des écoles qui fermeront dans certains territoires.»
Pour éviter ce scénario politiquement explosif, Elisabeth Borne pourrait faire des économies en revenant sur le déploiement, à la rentrée 2025, des «groupes de besoin» au collège, en français et en mathématiques. Anne Genetet avait déjà annoncé en novembre vouloir partiellement les étendre dans les classes de quatrième et de troisième, ce qui nécessite au moins un millier de postes, selon la rue de Grenelle. Repoussé à deux reprises depuis décembre, le comité social d’administration (CSA) du ministère de l’Education, qui doit fixer les moyens pour la rentrée prochaine, se tiendra ce vendredi 17 janvier 2025.