En résumé :
- Une intervention policière s’est déroulée ce vendredi 3 mai en fin de matinée dans les locaux de Sciences-Po Paris, occupés par des étudiants qui protestent contre la guerre dans la bande de Gaza. Des mobilisations ont également lieu à Lille, Lyon ou encore Saint-Etienne.
- Un rassemblement a eu lieu dans l’après-midi à Paris, sur la place du Panthéon (Ve arrondissement), à l’appel de plusieurs syndicats étudiants. Mots d’ordre : «Pour le peuple palestinien, non à la répression et à la fermeture des facs».
- Le gouvernement surveille la situation comme l’huile sur le feu. La ministre de l’Enseignement supérieur Sylvie Retailleau a demandé aux présidents d’université de veiller au «maintien de l’ordre», en utilisant «l’étendue la plus complète des pouvoirs» dont ils disposent.
Jean-Luc Mélenchon en soutien aux étudiants. Le leader insoumis, dont le parti fait du soutien à Gaza un axe central de sa campagne pour les européennes, a écrit un message de soutien ce vendredi aux étudiants mobilisés pour le sort des Palestiniens. «J’assume un devoir d’apologie de l’engagement militant de la jeunesse contre le génocide en cours à Gaza. J’invite tous ceux qui le peuvent à se joindre à eux et à les soutenir moralement et matériellement», affirme Mélenchon, qui estime que «cette jeunesse découvre les doubles standards moraux de ses aînés, les violences policières et la diffamation médiatique permanente».
A Sciences-Po Paris, une évacuation «dans le calme» selon la préfecture. Une semaine après une mobilisation émaillée déjà de tensions à Sciences-Po Paris et une précédente évacuation de locaux, «91 personnes ont été évacuées, sans incident», à la mi-journée vient d’annoncer la préfecture de police de Paris, qui a annoncé une intervention «sans incident» et qui s’est déroulée «dans le calme».
Après l’évacuation, Sciences Po Lyon fermé jusqu’au 12 mai. Comme à Paris, les forces de l’ordre ont délogé ce vendredi des manifestants propalestiniens qui bloquaient le site de Sciences-Po Lyon et la direction a décidé de laisser l’école fermée la semaine prochaine. «L’opération s’est déroulée […] dans le calme, sans qu’aucune personne ne soit blessée. Au regard du contexte, la fermeture administrative de l’établissement est prolongée jusqu’au 12 mai», a annoncé dans un communiqué la direction de l’institut. Quelques dizaines de manifestants avaient bloqué un amphithéâtre jeudi après-midi, avant d’y passer la nuit. En meeting pour LFI à Vénissieux (est de Lyon), Rima Hassan et Mathilde Panot leur avaient rendus visite dans la soirée.
Le mouvement s’étend partout dans le monde. Après, les Etats-Unis, la France ou le Canada, voici les étudiants allemands qui se mobilisent pour le sort des Palestiniens. Un rassemblement devant l’université Humboldt de Berlin, au centre de la capitale, a eu lieu ce vendredi. Environ 300 personnes ont rejoint la manifestation dont quelques dizaines ont tenté un sit-in dans la cour de l’université, avant l’intervention des forces de l’ordre. Certains manifestants ont été expulsés «par la force» après avoir refusé un autre lieu proposé, a indiqué la police berlinoise sur X. Le maire de Berlin, Kai Wegner, a critiqué la manifestation, écrivant sur X que la ville ne voulait pas de «situations comme aux Etats-Unis ou en France».
En Australie, les étudiants se mobilisent aussi à Sydney. Des centaines de manifestants pro-palestiniens et pro-israéliens se sont retrouvés face-à-face ce vendredi dans une université de Sydney, en Australie, rattrapée par le tumulte des manifestations sur les campus américains et du conflit au Moyen-Orient. Les deux camps ont scandé des slogans et brandi des drapeaux. Mais malgré quelques échanges tendus, les deux rassemblements sont restés pacifiques.
Students at the University of Sydney have formed a line around the camp in support of Gaza pic.twitter.com/CG1KpZjWWI
— Jordyn Beazley (@jordynbeazley) May 3, 2024
Sur la place du Panthéon.
A Grenoble aussi, les étudiants se mobilisent. Des dizaines d’étudiants et de personnels de l’université déambulent sur le campus universitaire de la ville depuis la mi-journée. Selon le Dauphiné libéré, ils réclament «la fin du génocide à Gaza» et des partenariats qui lient l’université grenobloise à l’une de ses homologues en Israël.
La place du Panthéon se remplit. Plusieurs centaines de personnes sont déjà présentes sur la place du Panthéon à Paris pour afficher leur opposition à la guerre dans la bande de Gaza. Face aux caméras et micros de nombreux médias, dont plusieurs étrangers, les étudiants mobilisés sur les différents campus parisiens scandent des chants propalestiniens, parfois très critiques du gouvernement français. «Israël assassin, Macron complice», peut-on entendre. Plusieurs syndicats étudiants et partis politiques sont représentés, drapeaux levés, à l’instar de l’UNEF, de l’Union étudiante ou des organisations de jeunesse de La France insoumise, des Ecologistes et du Parti communiste. Par Enora Foricher
Les doctorants de Sciences-Po Paris regrettent la «criminalisation» du mouvement étudiant. Dans un communiqué publié sur les réseaux sociaux par la militante écologiste Claire Lejeune, doctorante à Sciences-Po Paris et ancienne candidate LFI aux élections législatives, le «collectif des doctorant·es» de l’établissement dénonce «la répression et la criminalisation du mouvement étudiant par la direction temporaire», qui a sollicité l’opération de la police, déjà appelée sur place la semaine dernière. «Ces interventions policières font suite aux ingérences directes du gouvernement dans les affaires de l’établissement, déplorent les signataires. Elles interrogent sur l’autonomie effective d’un établissement d’enseignement et de recherche comme Sciences-Po.»
Place du Panthéon à Paris, le rassemblement des étudiants a commencé.
Rassemblement en soutien à la Palestine sur la place du Panthéon à Paris pic.twitter.com/jYNWDOADlE
— AB7 Média (@Ab7Media) May 3, 2024
Rue Saint-Guillaume, le calme est revenu. Ils étaient 120 cette nuit à occuper Sciences-Po Paris. A 12h50, un cordon de CRS boucle désormais l’accès à l’établissement. «Nous avons préféré prendre le risque d’une évacuation par les forces de l’ordre plutôt que d’accepter un non-accord avec la direction qui ne nous proposait rien de nouveau», assume Mathieu (les prénoms ont été modifiés), étudiant en M2 d’affaires internationales. Lasse de cette situation, Adèle, étudiante en dernière année d’affaires publiques, déplore le recours à la force policière : «Faire évacuer ses propres étudiants par les forces de l’ordre, c’est un échec pour une institution.» Par Enora Foricher.
La direction de l’ESJ Lille décide de fermer l’école, ce vendredi. «En raison du blocage, toujours en cours ce vendredi matin, par un groupe de personnes très majoritairement extérieures à l’école, la direction de l’ESJ Lille a pris la décision, en concertation avec le rectorat et la préfecture et afin d’assurer la sécurité de l’ensemble de ses élèves et personnels, de fermer l’établissement pour la seconde journée consécutive», indique la direction de l’école de journalisme de Lille dans un communiqué. Elle dénonce également un blocage «qui entrave le droit à l’enseignement des étudiants» et dit vouloir organiser «à la reprise des cours», «des échanges sur le traitement journalistique de la situation humanitaire des populations dans la bande de Gaza». Elle ajoute que des représentants d’élèves seront reçus la semaine prochaine.
— ESJ Lille (@ESJLille) May 3, 2024
Des photos de l’évacuation de Sciences-Po Paris.
Le député LFI Thomas Portes dénonce le «choix de la répression» opéré par le gouvernement.
Avec @CaronAymericoff nous sommes aux côtés des étudiants de #SciencesPo à Paris mobilisés pour la fin du génocide à Gaza.
— Thomas Portes (@Portes_Thomas) May 3, 2024
Une fois de plus le gouvernement français se couvre de honte en faisant le choix de la répression contre les voix de la paix. pic.twitter.com/vooUhoZr8K
Les étudiants de Mexico se mobilisent à leur tour. Dans la plus grande université du Mexique, l’Université nationale autonome de Mexico, des dizaines d’étudiants ont dressé jeudi un camp avec des tentes et des drapeaux pour exprimer leur opposition à la guerre dans la bande de Gaza et leur soutien aux étudiants américains également mobilisés. Ils ont scandé «Vive la Palestine libre !» et «De la rivière à la mer, la Palestine vaincra !». Parmi leurs revendications, ils ont notamment demandé au gouvernement de rompre les relations diplomatiques avec Israël, comme la Colombie l’a décidé en début de semaine.
Devant les locaux de Sciences-Po Paris, pendant l’intervention des policiers.
Matignon revendique une «fermeté totale». «La fermeté est et restera totale», a fait savoir vendredi Matignon dans une déclaration diffusée à la presse, après le début de l’intervention policière contre les étudiants de Sciences-Po Paris mobilisés contre la guerre à Gaza. «S’agissant de la situation dans les établissements, certaines ont pu être réglées par le dialogue. Pour d’autres, des réquisitions par les présidents d’université ont été faites et les forces de l’ordre sont intervenues immédiatement. Cette fermeté paie : 23 sites perturbés ont été évacués hier», indique Matignon, ajoutant, pour Sciences-Po Paris, que Gabriel Attal avait «demandé l’intervention dès la réquisition de l’administrateur provisoire».
Marine Tondelier apporte son soutien aux manifestants. Invitée de Franceinfo ce vendredi matin, la secrétaire nationale des Ecologistes Marine Tondelier a salué la mobilisation des étudiants contre la guerre dans la bande de Gaza. «Si j’étais étudiante aujourd’hui, il ne fait nul doute que je serais mobilisée. Je trouve ça très sain quand on a 20 ans ou 25 ans et quand on voit ce qui se passe dans cette zone du monde de dire que le droit international doit être appliqué, à Gaza comme ailleurs», a-t-elle expliqué. Et la conseillère régionale des Hauts-de-France de dénoncer les interventions policières qui se succèdent dans les facs. «Je suis assez choquée du tournant répressif que prend aujourd’hui la France», déclare-t-elle.
Intervention policière en cours à Sciences-Po Paris. La police a commencé ce vendredi à évacuer plusieurs dizaines de militants opposés à la guerre dans la bande de Gaza qui occupaient les locaux de l’école depuis la veille. Selon un étudiant de Sciences-Po qui s’est exprimé auprès de la presse, «une cinquantaine d’étudiants étaient encore présents dans les locaux de la rue Saint-Guillaume» au moment où les forces de l’ordre sont entrées dans le bâtiment, une semaine après une mobilisation émaillée de tensions dans le prestigieux établissement.
Évacuation en cours de #SciencesPo : plusieurs dizaines de CRS rentrent en ce moment dans l’école pour mettre fin à l’occupation. pic.twitter.com/WXIT5i8duR
— Clément Lanot (@ClementLanot) May 3, 2024
Aux Etats-Unis, la mobilisation pro-Gaza des étudiants divise les universités et le pays. Entamées il y a plus de deux semaines, les actions estudiantines en faveur de la Palestine sont désormais violemment réprimées par la police américaine. Joe Biden a été contraint d’intervenir et de durcir sa position par crainte d’apparaître comme le Président du chaos intérieur. Lire notre récit.