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Récit

En Guyane, la cocaïne côté pile et côté crack

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Devenu une des principales routes du trafic de cette drogue convoitée, le département ultramarin voit son nombre de consommateurs augmenter d’années en années. Mais la substance, qu’elle soit en poudre ou cristallisée, révèle avant tout des usagers aux «parcours de rupture et d’exclusion sociale» très violents.
Silva devant le carbet central du Germe, une ferme-pilote d’insertion et refuge pour les personnes en errance situé en pleine forêt à quatre heures à l'est de Cayenne, le 12 janvier. (Quentin Veuillet/Libération)
par Emile Boutelier, Correspondance à Cayenne
publié le 16 avril 2022 à 12h51

Sur la ligne aérienne Cayenne-Orly, le voyageur imaginatif aime à se livrer à un petit jeu : subodorer qui dans l’avion est une «mule», ces personnes qui transportent sur elles – ou plus souvent en elles – jusqu’à deux kilos de cocaïne. Les services de douane en ont interpellé 1 200 en 2019 (contre 88 en 2010), et le procureur de la République à Cayenne estime qu’il y en aurait entre six à dix par vol. Depuis la répression massive qui a touché la route entre le Suriname voisin et les Pays-Bas à la fin des années 2000, la Guyane est devenue une des principales routes d’importation de la poudre blanche en Europe. 15 à 20% des entrées de cocaïne dans l’Hexagone y transiteraient, selon un rapport du Sénat publié en septembre 2020.

Connue pour ses «mules», la Guyane l’est moins pour ses consommateurs, en augmentation ces dernières années. Outre l’abondance du produit et ses prix de vente défiant toute concurrence (5 000 euros le kilogramme contre 33 500 en métropole en 2020, selon l’OFDT), cette région française ultramarine est un territoire marqué par une grande précarité sociale, qui s’est encore aggravée avec la pandémie de Covid-19. Mais la cocaïne a deux faces. Côté pile, le