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Libération
Reportage

80 ans du Débarquement : en Normandie, la «mémoire compliquée» du cimetière allemand de la Cambe

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Inauguré en 1961 pour donner une sépulture aux 21 300 soldats allemands tués à l’été 1944, le cimetière de la Cambe, où sont enterrés aussi 2 100 Waffen SS, divise encore aujourd’hui et attire toujours des nostalgiques du nazisme.
Cette année, une cérémonie est organisée au cimetière de La Cambe non pas le 6, mais le 5 juin. (Gilles Targat/Photo12. AFP)
par Maxime Pionneau, Envoyé spécial à La Cambe (Calvados)
publié le 1er juin 2024 à 8h55

C’est une commune qui compte plus de Waffen SS morts que d’habitants. A cinq kilomètres à vol de mouette d’Omaha Beach, La Cambe ne se distingue pas par le dynamisme de ses commerces : sa boulangerie est à vendre, mais un bar-tabac perdure dans la rue Principale (c’est son nom). La plupart des 548 habitants (vivants) résident au nord de la route nationale séparant cette commune du Calvados en deux. Un discret panneau bilingue («Soldatenfriedhof - Cimetière militaire allemand») indique l’autre côté. Celui des morts. Là où reposent près de 21 300 soldats allemands (dont 2100 Waffen SS) tués pendant les douze semaines de la bataille de Normandie, à l’été 1944.

Avec ses croix de basalte sombre et ses pierres tombales, l’endroit, champêtre et sobre, est l’antithèse du cimetière américain de Colleville-sur-Mer – croix blanches rigoureusement alignées et vue sur mer. Inauguré en septembre 1961, il est le plus important des six cimetières allemands de Normandie. «Il est celui de soldats qui n’avaient pas tous choisi ni la cause ni le combat», lit-on sur un panneau qui borde le parking. Quatre-vingt ans après le débarquement le 6 juin 1944 et les combats qui firent 80 000 morts côté allemand, la question reste toujours en suspens : comment conserver leur mémoire sans «célébrer» le nazisme ?

La «réconciliation par-dessus les tombes»

C’est un matin de printemps et le ciel normand veut un peu se la jouer poème de Goethe ou tableau de Friedrich. «C’était des soldats, pas des nazis», croit savoir un homme venu en fami