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Discriminations

Exil des diplômés musulmans : «Rester en France reviendrait à vivre dans un pays où on n’est pas acceptés»

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A l’occasion de la sortie du livre «la France, tu l’aimes mais tu la quittes», une dizaine de jeunes Français musulmans racontent à «Libé» les stigmatisations et discriminations dont ils sont victimes, au point de s’exiler ou de l’envisager.
Nawel, après un passage en Irlande, a galéré en revenant en France avant de se faire embaucher dans un média social. (Marie Rouge/Libération)
par Rachid Laïreche, Eva Fonteneau, correspondante à Bordeaux, Stéphanie Maurice, correspondante à Lille et Théo Mouraby, à Lyon
publié le 26 avril 2024 à 7h00

Un café crème et une minute, voire deux, de réflexion. Nawel (1) est à la recherche des mots pour décrire ses sentiments. La trentenaire est «chargée de sécurité en ligne» pour un média social. Elle a «galéré» pour se faire embaucher. La faute à quoi ? Son nom, son prénom et sa religion, dit-elle dans une brasserie parisienne proche de la place de la République. «Je fais attention à ne pas tomber dans la colère parce qu’on nous refuse le droit à la colère. Elle est perçue comme une forme de violence alors que nous la subissons au quotidien.» Le «nous» englobe de nombreux Français musulmans diplômés. Ils dénoncent une atmosphère «pesante» dans le monde du travail, les médias et l’espace public. Ils ne supportent plus les regards de travers les jours qui suivent les attentats, la «suspicion» et les débats politiques. Une vie avec la «boule au ventre», disent-ils.

Aïcha (1) qui enseigne la littérature dans le Val-de-Marne garde encore en elle la souffrance lorsqu’un collègue lui a posé une question après l’attaque du Hamas en Israël le 7 octobre. Elle était installée en train de boire son café en pianotant sur son téléphone dans la salle des professeurs. Tout était calme. Puis : «Et toi Aïcha, tu es bien silencieuse, ça ne te fait rien ce qui vient de se passer ?» Elle a fondu en larmes dans sa voiture sur le chemin du retour. En arrivant à son domicile, Aïcha a demandé à son compagnon : «Pourquoi on reste encore ici alors qu’o