Eviction du juge Edouard Durand en décembre, démissions à la chaîne, mise en retrait de la vice-présidente Caroline Rey-Salmon après accusations d’agression sexuelle puis démission du président à peine nommé Sébastien Boueilh… Après «deux mois compliqués» pour la Ciivise, un nouveau «collège directeur» va diriger l’instance chargée de lutter contre l’inceste et les violences sexuelles faîtes aux enfants, a annoncé la ministre déléguée chargée de l’Enfance, de la Jeunesse et des Familles, Sarah El Haïry, ce mercredi 3 avril dans le Figaro.

Ils seront désormais quatre, «aux profils complémentaires», à la tête de la commission : Maryse le Men Régnier, présidente de la Fédération France Victimes, «apportera son expertise de magistrate», justifie la ministre déléguée. Thierry Baubet, chef du service de psychopathologie de l’enfant à l’hôpital Avicene, apportera son point de vue de médecin, un choix «essentiel […] quand on sait à quel point les violences sexuelles posent la question des psychotraumatismes». Solène Podevin, présidente de l’association Face à l’inceste, apportera, elle, «une expérience associative précieuse». Enfin, Bruno Questel, ancien maire et député, qui avait témoigné en 2021 d’un viol dont il avait été victime à l’âge de 11 ans, offrira son «regard d’élu», a argué Sarah El Haïry.

Mais la ministre déléguée chargée de l’Enfance, de la Jeunesse et des Familles l’assure dans le journal de droite (dont l’interview est consultable en intégralité ici) : «La Ciivise, ce n’est pas qu’une histoire de «casting». C’est d’abord la responsabilité de notre société de mieux prévenir et prendre en compte les dégâts de l’inceste et des violences sexuelles». Parmi les priorités énoncées, Sarah El Haïry souhaite que les professionnels soient mieux formés à «l’accueil de (la) parole», pour que «la protection des enfants soit effective en tout lieu». La membre du gouvernement tient également à approfondir «la question des enfants en situation de handicap» et «des auteurs mineurs.

«J’installe aujourd’hui une gouvernance renouvelée, chargée de deux missions, au-delà de l’accueil de la parole des victimes qui sera poursuivi et amplifié», a-t-elle ajouté. «D’abord, faire de tous les lieux de vie des enfants des lieux sûrs. Ensuite, construire une chaîne de protection solide de tous les enfants par tous les adultes.»

La ministre déléguée déplore toutefois un parcours de reconstruction, après avoir subi de tels actes, «trop long, trop cher, jusqu’à 30 000 euros». Une «double peine» pour les victimes, selon Sarah El Haïry. Dans les faits, la commission travaillera, avec médecins et spécialistes, à la mise en place d’un «parcours de santé mieux construit, plus accessible», a-telle promis. Le suivi des 82 recommandations de la Ciivise, qui visaient à améliorer le «repérage», le «traitement judiciaire», la «réparation» et la «prévention» des violences sexuelles, est «toujours à l’ordre du jour».

Lancée en 2021 dans le sillage du livre La Familia grande – où Camille Kouchner dévoilait l’inceste commis sur son frère par le politologue Olivier Duhamel –, la Ciivise a permis de documenter les mécanismes de l’inceste et de recueillir près de 30 000 témoignages de victimes.