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Petit pas

Fausses couches : les jours de carence supprimés en cas d’arrêt maladie dès le 1er janvier

Promesse de campagne d’Emmanuel Macron, la suppression des jours de carence s’accompagnera d’ici septembre de la mise en place d’un parcours d’accompagnement spécifique.
Les Françaises, salariées du privé comme fonctionnaires, pourront bénéficier d’un arrêt maladie, délivré par leur médecin, sans jour de carence. Un arrêt implique habituellement trois jours de retenue de salaire dans le secteur privé et une journée dans le public. (Photo by Rafa Elias/Getty Images)
publié le 31 décembre 2023 à 16h48

La fin d’une double peine. Les femmes n’auront plus à trancher entre subir une perte de salaire ou endurer une interruption spontanée de grossesse au travail. A partir de ce 1er janvier 2024, un premier pas sera franchi en France pour améliorer la prise en charge des fausses couches, soit une grossesse s’arrêtant naturellement avant le stade de viabilité du fœtus (22 semaines d’aménorrhée dans notre pays). Les Françaises, salariées du privé comme fonctionnaires, pourront bénéficier d’un arrêt maladie, délivré par leur médecin, sans jour de carence. Un arrêt implique habituellement trois jours de retenue de salaire dans le secteur privé et une journée dans le public.

Annoncée par la Première ministre Elisabeth Borne le 1er mars dans un entretien au magazine Elle, cette promesse de campagne d’Emmanuel Macron a été incluse dans la proposition de loi visant à favoriser l’accompagnement psychologique des femmes victimes de fausse couche de la députée Modem Sandrine Josso, adoptée par le Parlement le 29 juin. «La situation actuelle fait qu’une femme qui subit une fausse couche vit non seulement des traumatismes physiques et psychologiques, mais subit aussi un coût financier. Ça m’est insupportable», pointait le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Stanislas Guerini dans Libération. Cette avancée législative s’appuie sur la multiplication de témoignages, d’anonymes comme de personnalités, sur cette épreuve autant psychologique que physique que vit une femme sur 10, et pourtant toujours aussi mal considérée.

Accompagnement psychologique

Ce dispositif qui constituant une première reconnaissance indispensable, reste néanmoins à renforcer. Le second parent est notamment exclu de la levée du jour de carence en France. Le collectif «Fausse couche, vrai vécu», fondé par Judith Aquien, Mathilde Lemiesle et Sandra Lorenzo, appelle à s’inspirer de la Nouvelle-Zélande où, depuis 2022, un congé payé de trois jours est accordé aux deux parents en cas d’interruption spontanée de grossesse. En mars 2022, une proposition de loi portée par l’ex-députée écolo Paula Forteza, incluant un dispositif analogue à celui des Néo-Zélandais, avait été retoquée par les députés. Comme dans le cas du congé menstruel (bien moins consensuel), quelques entreprises à l’image de Carrefour ou la branche professionnelle Syntec (professions du numérique et de l’ingénierie) ont décidé d’aller plus vite que la loi, en accordant des jours de congé en cas d’arrêt spontané de grossesse mais ces initiatives restent pour l’heure à la marge.

Au-delà de la sphère professionnelle où une protection contre le licenciement a aussi été ajoutée pour les «fausses couches tardives», soit celles survenant entre la 14e et la 21e semaine d’aménorrhée (moins de 1 % des cas), le texte de Sandrine Josso prévoit également la mise en place par chaque agence régionale de santé (ARS) d’un parcours d’accompagnement à partir du 1er septembre 2024. L’objectif de ce protocole associant médecins, psychologues et sages-femmes, dont les contours restent encore à préciser, est double : améliorer l’accompagnement systématique, l’orientation, l’information de ces femmes souvent isolées mais aussi de leurs partenaires, tout en améliorant la formation des professionnels de santé sur les conséquences psychologiques trop souvent minimisées des interruptions spontanées de grossesse.

En particulier lors de fausses couches précoces, les femmes se voient rarement proposer un accompagnement psychologique. Les besoins sont pourtant criants. Selon une étude publiée en 2020 dans l’American Journal of Obstetrics and Gynecology, près d’une femme sur trois ayant subi une fausse couche précoce ou une grossesse extra‑utérine souffrirait de stress post‑traumatique, un quart d’entre elles présenteraient des symptômes d’anxiété modérée à sévère et 10 % souffriraient de dépression. Pour faciliter la mise en place de ce soutien, les sages-femmes sont également désormais autorisées à adresser des patientes dans le cadre du dispositif Mon Parcours Psy, permettant le remboursement de huit séances par an chez un psychologue. Un relais bien limité puisque peu de professionnels de la santé mentale y prennent part.