Un soir de juillet, à 4 heures du matin, un minibus traverse discrètement le centre de la Bretagne, des Côtes-d’Armor au Morbihan. A son bord, sept salariés – quatre Roumains et trois Français –, tous ramasseurs de volailles. Le chantier a lieu chez Marc (1), un agriculteur de 37 ans. Là-bas, plusieurs camions attendent d’être chargés de poulets, avant de prendre la direction de l’abattoir. L’équipe va s’attaquer cette nuit à un des poulaillers de Marc, rempli de 19 000 coqs. Ils seront transformés en nuggets et burger de McDonald’s.
Le hangar de l’exploitation s’ouvre et laisse entrevoir une nuée d’animaux blancs couchés les uns à côté des autres, parfois entassés. Ils sont en plein sommeil. L’exploitant donne le coup d’envoi de l’opération au volant de son tracteur chargé de caisses vides. Il s’approche à toute berzingue. En cadence, l‘équipe de sept ramasseurs se met au travail : ils entassent les volailles dans de grandes caisses à tiroirs. «Deux», «trois», «cinq» : ils crient le nombre de poulets qu’ils tiennent en main en les lançant dans les coffres. Tous les volatiles ou presque sont attrapés par les pattes, puis déplacés la tête en bas. Certains se débattent, tentent de battre des ailes, et lancent des piaillements frénétiques. D’autres sont déjà morts et lancés inertes sur le côté du poulailler.
L’odeur de fiente, âcre, et la poussière prennent à la gorge. La cadence est infernale. Le tracteur a à peine le temps de faire l’aller-retour pour aller