Expulsé, encore et toujours. Dès l’aube, des centaines d’exilés ont à nouveau été évacués ce jeudi 30 novembre de leurs lieux de vie informels, dans une opération de grande ampleur menée en même temps dans les principaux campements de Calais (Pas-de-Calais) et de Loon-Plage près de Dunkerque (Nord). Des dizaines de bus ont été mobilisées pour emmener les migrants, majoritairement Soudanais et Erythréens, vers des centres d’accueil à l’écart du littoral, à travers toute la France. Au total 1 244 personnes ont été placées (982 dans le Nord et 262 dans le Pas-de-Calais). 130 personnes en situation irrégulière ont par ailleurs été interpellées en vue d’un placement en retenue administrative.
Interview
Les préfectures du Nord et du Pas-de-Calais justifient cette évacuation massive par des températures «froides» qui rendent les «conditions de vie indignes et dangereuses sur les campements.» Dans les abris de fortune détrempés par les pluies record de novembre, les températures sont actuellement négatives la nuit. Avec ces opérations – mettant en application une décision du tribunal judiciaire de Dunkerque ordonnant l’expulsion des occupants sans droit ni titres des parcelles concernées – l’Etat défend sa «mise à l’abri» des exilés.
L’opération réalisée dans l’urgence, au petit matin, ressemble plus à des «expulsions forcées» pour les associations. Utopia 56 évoque dans un message publié sur X (ex-Twitter) une «expulsion d’une ampleur jamais vu à Dunkerque et Calais depuis la ‘’jungle’’». Selon l’association venant en aide aux personnes exilées, tente, matelas, couette ont été confisqués. «Tout est détruit.»
«Une ouverture du plan grand froid de façon plus souple»
Selon le Secours catholique, certains migrants ont été poursuivis ou contraints de monter dans les bus. La présidente de l’association, Véronique Devise, a demandé «une ouverture du plan grand froid de façon plus souple», pour héberger les migrants sur le littoral.
Le Secours catholique appelle également à multiplier les lieux d’accueil de jour, pour faciliter l’accès au droit des migrants et une meilleure protection de l’enfance. L’association compte saisir la Défenseure des droits au sujet de la situation de personnes vulnérables, de familles avec jeunes enfants ou de femmes enceintes, obligées de rester dehors. Dans ce qui pourrait être un semblant de réponse, le préfet de la région Hauts-de-France et du Nord, Georges-François Leclerc a annoncé ce jeudi soir «renforcer le dispositif d’accompagnement et d’accueil des personnes à la rue».
Ce qui n’empêche pas la fédération d’associations Auberge des Migrants de s’attendre à voir revenir les personnes évacuées «dans quelques jours, par leurs propres moyens, après avoir été envoyées à Rennes ou Perpignan, pour se retrouver dans les mêmes champs de boue, mais sans leurs tentes».