Le grand frère et la petite sœur sont installés derrière une grande table blanche. Ils ne causent pas. Tension. Trac. Gêne. Ils ne savent pas trop par où commencer. Leur histoire est trop «folle», disent-ils du bout des lèvres. Les coudes posés sur la table, Alexandre, 32 ans, et Céline, 27 ans (1), cherchent du regard leur avocate. Une manière de lui refiler le ballon. La parole est à la défense. Dans son bureau, à quelques rues de la gare Saint-Lazare, à Paris, Me Camille Lucotte croise ses jambes. Relit ses notes. «Je vais prendre le temps parce que nous avons face à nous un dossier complexe.» Tout commence en 2016. Aintsoa (1), la mère de Céline et Alexandre, fait une demande de transcription de l’acte de naissance de ses enfants. Ils sont nés à Madagascar. Une pratique juridique qui vise à inscrire une naissance à l’étranger au registre français. Un acte symbolique. Jusqu’ici, tout va bien.
Céline reçoit un courrier des mois après la demande. Un jugement a été rendu par le tribunal judiciaire de Lille sans sa présence. Elle doit restituer en préfecture ses papiers d’identité français. Une décision brutale. Pourquoi ? «La justice lui a retiré la nationalité française car elle a considéré que son acte de naissance était suspect. Pourtant, sa nationalité française n’est pas contestable : son père est né français et sa mère est française par naturalisation. Ça a été le début d’un calvaire qui n’est toujours pas terminé. Son frère a vécu les mêmes difficultés