L’avancée est majeure. Ce jeudi 11 juillet, la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) a rendu sa décision sur le droit des femmes afghanes à obtenir le statut de réfugiées en France en raison de leur genre. «L’ensemble des femmes afghanes» qui fuient l’Afghanistan en raison des mesures discriminatoires prises à leur encontre par les talibans «peuvent obtenir le statut de réfugiées» du fait de «leur appartenance au groupe social des femmes afghanes», précise la décision de l’instance.
Et les juges soulignent même : «Les femmes et jeunes filles afghanes sont, dans leur ensemble, perçues d’une manière différente par la société afghane» et «doivent être considérées comme appartenant à un groupe social susceptible d’être protégé comme réfugié».
Dans l'œil de Libé
Depuis l’arrivée des talibans au pouvoir, les femmes afghanes ont perdu de nombreux droits fondamentaux. C’est pour cette raison que grand nombre d’entre elles demandent l’asile en France. En France, le droit d’asile repose en premier lieu sur la Convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés.
Selon son premier article 1 : «le terme «réfugié» s’appliquera à toute personne […] craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques». Le terme «groupe social» est celui qui permet aux juges d’avoir le plus de libertés, en ce qu’il leur revient de définir ce qu’il peut englober, ou non. Par exemple, avant la décision du jour, la cour reconnaissait déjà l’existence d’un «groupe social» dans le cas des homosexuels dans certains pays (Mali, Tunisie, Egypte…), des femmes voulant se soustraire à un mariage forcé (Mali, Mauritanie, Guinée, Burkina Faso…) ou encore à celles risquant l’excision (Egypte, Cameroun…).
Déboutées
Le 14 juin, la CNDA a examiné trois affaires distinctes, concernant une femme afghane évoquant la perte de droits depuis l’arrivée au pouvoir des talibans en 2021, une ressortissante albanaise redoutant des violences domestiques et une Mexicaine des violences sexuelles. Ces trois femmes avaient finalement été déboutées par l’Ofpra (Office français de protection des réfugiés et apatrides), et c’est précisément sur ces dossiers que la cour s’est prononcée ce jeudi.
En janvier dernier, la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union européenne avait déjà ouvert la voie à une telle décision. «Les femmes, dans leur ensemble, peuvent être regardées comme appartenant à un groupe social» et prétendre ainsi au statut de réfugié si «dans leur pays d’origine elles sont exposées, en raison de leur sexe, à des violences physiques ou mentales, y compris des violences sexuelles et domestiques», avait estimé l’arrêt de l’instance européenne.
Mise à jour : à 18h42, avec l’ajout de la décision de la Cour nationale du droit d’asile.