La direction de la Gaîté Lyrique, établissement culturel parisien à l’arrêt depuis mi-décembre et l’occupation de ses locaux par de jeunes migrants, l’avait annoncé mercredi 26 février : si les autorités ne trouvaient pas une solution pour prendre en charge ces adolescents d’ici ce vendredi, elle cesserait la gestion du site. «Sans intervention des autorités d’ici vendredi, la Gaîté Lyrique SAS et ses équipes seront contraintes de quitter le bâtiment et de suspendre l’exécution des contrats des prestataires en charge de la sécurité incendie, de la sûreté, de l’hygiène et la propreté, de la maintenance, de la collecte des déchets», précisait la direction dans un communiqué.
C’est chose faite : les personnels de la Gaîté Lyrique quittent les lieux. Dans une conférence de presse ce vendredi 28 février, qui réunissait les principaux acteurs du lieu culturel, le directeur de Singa (l’une des cinq organisations qui chapeautent la Gaîté) et ancien candidat à la présidentielle en 2017, Benoît Hamon, a dénoncé l’«irresponsabilité des pouvoirs publics» : «La réponse de l’Etat est blanche ! Tout juste le voit-on avec les quelques interventions des forces de police. Le ministère de l’Intérieur ne répond absolument pas à ses obligations », a estimé l’ancien socialiste durant cette conférence de presse, comme le rapporte le Parisien.
Le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, a réagi vendredi sur X en renvoyant la responsabilité à la mairie de Paris qui «a tardé […] à engager un recours devant la juridiction compétente, laquelle a ordonné cette évacuation le 13 février, mais avec un délai d’un mois avant son exécution. Elle ne sera possible, de surcroît, que si la ville sollicite auprès du préfet de police le concours de la force publique».
Les salariés, «qui ont exprimé à plusieurs reprises leur pleine confiance et soutien à la direction», ont eux fait valoir leur droit de retrait mardi, «évaluant que la situation constitue aujourd’hui un danger grave et imminent pour eux, pour les personnes qui occupent le lieu et pour le bâtiment», expliquait le communiqué de mercredi. La Gaîté Lyrique avait indiqué avoir envoyé un courrier à la Ville de Paris, propriétaire des lieux, l’informant de sa volonté «de suspendre le contrat de concession qui la lie à celle-ci, à compter du vendredi 28 février».
Situation «explosive»
Selon un décompte de l’établissement effectué vendredi dernier, 446 jeunes occupent les lieux. Le 10 décembre, environ 200 migrants mineurs ont investi les locaux de la salle culturelle, située dans le IIIe arrondissement de Paris. Les jeunes exilés, rassemblés dans le «Collectif des jeunes du parc de Belleville», demandent à être hébergés et que leur minorité soit reconnue.
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La Gaîté Lyrique alerte aussi sur la situation «explosive» et «indigne» au sein de l’établissement, dénonçant «une promiscuité intenable» qui entraîne des violences «croissantes en gravité et en fréquence». «Depuis 79 jours, les salariés assurent, sur la base du volontariat, des gardes sur site 24 /24h, alors que cela ne relève ni de leurs compétences, ni de leurs fonctions», tout comme «l’accueil et la mise à l’abri des occupants», rappelle la Gaîté Lyrique. Ces salariés «ont pallié au mieux les carences des autorités administratives en offrant une aide d’urgence en plein hiver», souligne l’établissement.
Saisi par la Ville de Paris, le juge des référés du tribunal administratif avait ordonné le 13 février l’évacuation dans un délai d’un mois. La mairie avait alors indiqué qu’elle ne ferait néanmoins pas appel à la force publique, affirmant avoir lancé cette procédure pour forcer l’Etat, compétent en matière d’hébergement d’urgence, à «prendre ses responsabilités». Vendredi, la mairie a annoncé qu’elle prendrait en charge «les activités de gardiennage et de sécurité» du bâtiment. Si elle n’a pas précisé quand se ferait cette prise de relais, elle a assuré qu’il n’y aurait «pas de vacance».
Mis à jour le vendredi 28 février avec la conférence de presse de la direction de la Gaîté Lyrique ; à 19 h 06 avec l’annonce de la mairie.