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«Il n’y a rien de nouveau maman» : plongée dans la vie paralysée des étrangers en attente de renouvellement de leur titre de séjour

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Confrontés aux retards de traitement de leur dossier dans les préfectures, plusieurs étrangers passés en quelques jours d’une situation régulière à irrégulière racontent à «Libération» les conséquences de ces manquements : peur des contrôles policiers, perte d’emploi, voyages rendus impossibles.
Aïssé (prénom d'emprunt) attend depuis des mois que sa demande de renouvellement de titre de séjour soit validée. Chez elle en Normandie, le 3 mai 2025. (Florence Brochoire/Libération)
publié le 4 mai 2025 à 15h10

Des photos décorent les murs du long couloir qui mène au salon. Des bouts de vie collés les uns aux autres : vacances au bled, kermesses et naissances. Mounir le prolixe propose de l’eau, du café, du thé ou «autre chose». Il parle encore et encore en restant debout. Le père de famille (trois adolescents) profite de notre présence pour mettre des mots sur son cas. Une sorte de délivrance. Mounir garde tout pour lui dans son quartier de Creil (Oise), sur les chantiers où il turbine, ou au café du centre-ville. A la tombée de la nuit, lorsque les enfants sont plongés dans leurs rêves, il fait le point sur la situation avec son épouse. Un rituel qui consiste à rafraîchir la page du site de la préfecture. «J’ai fait une demande pour le renouvellement de ma carte de résidence en novembre mais je suis toujours en attente, dit-il les sourcils froncés. Je suis en situation irrégulière, à cause des retards de la préfecture, depuis le mois de janvier.» Il ne trouve plus le sommeil.

Mounir, 51 ans, est un long type à la voix grave. Il est arrivé dans l’Oise au début du siècle après son mariage avec Samira. Les deux se connaissent depuis toujours, où presque. Elle passait tous ses étés en Kabylie, en Algérie, au milieu des montagnes, dans un petit village qui a vu naître Mounir. Une complicité depuis la tendre enfance. Du cache-cache au milieu des oliviers au grand amour. Ça sautait aux yeux. Mounir a fait les choses dans les «règles». Il a écrit une