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Libération
Reportage

«Je ne pouvais pas les laisser là, il faisait froid» : voyage dans cette France qui aide les exilés

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Loi immigrationdossier
Ils sont agents municipaux, instits, membres d’associations d’aide aux réfugiés. Ces citoyens ont choisi de tendre la main aux exilés, dans un contexte politique où les débats se sont durcis. Alors que le projet de loi immigration est discuté de nouveau à l’Assemblée, «Libération» les a rencontrés, de Lyon au Val-de-Marne en passant par Paris.
La Maison de Rodolphe regroupe un accueil de jour et un centre d’hébergement pour familles. Jeudi à Lyon. (Alexandre Bagdassarian/Hans Lucas pour Libération)
publié le 10 décembre 2023 à 20h48

Il est long et carré. Il a les cheveux attachés, un chignon vissé sur le crâne. Ismaël est agent municipal dans le Val-de-Marne. Un gardien de gymnase. Le trentenaire, qui se balade toujours avec son trousseau de clés, connaît du monde dans les environs. «Je suis un enfant du coin», dit-il posé dans sa petite loge à l’entrée du gymnase. Il repère rapidement les têtes qui ne sont pas «du coin». Ismaël a fait une rencontre l’an passé. Une famille – un couple et trois enfants – est restée une après-midi entière sur un banc derrière le gymnase. «Je pensais qu’ils attendaient une personne mais c’était étrange. Deux enfants dormaient sur le banc, un autre dans une poussette et les parents étaient silencieux.» Ismaël s’approche ; comprend. La famille est à la rue. Elle est originaire du Nigeria. Ils discutent en mélangeant le français et l’anglais. La famille raconte son périple, la fatigue, la galère. «J’étais choqué et coincé, se souvient le gardien. Je ne pouvais pas les laisser sur le banc.» Il ouvre les portes du gymnase, offre un café et les emmène chez lui en fin de journée. «Je n’avais pas le choix : il faisait froid, les enfants étaient petits, il y avait un bébé, et le regard des parents était mortel, épuisé, ils étaient à bout. Je leur ai laissé mon appartement durant une grosse semaine et je suis allé dormir chez mes parents.»

L’agent municipal a frappé à toutes les portes afin de trouver une solution. Ils ont été hébergés en urg