Un premier acte avant une mobilisation qui s’annonce encore plus importante dans une semaine. Plusieurs dizaines de rassemblements sont organisés ce dimanche 14 janvier dans toute la France contre la loi immigration votée le 19 décembre dernier. Plus de 400 collectifs, associations, syndicats, comme Solidaires, et partis politiques, comme La France insoumise (LFI), ont appelé à manifester à dix jours du passage du texte devant le Conseil constitutionnel le 25 janvier.
Ainsi, des milliers de personnes se sont rassemblées dans la matinée comme à la Rochelle, à Nîmes, Saint-Etienne ou Lannion. D’autres rassemblements avaient lieu dans l’après-midi, comme à Bordeaux, Lyon, Marseille ou Strasbourg, où 2 000 à 3 000 personnes ont défilé à chaque fois. Dans son appel à manifester, le syndicat Solidaires dénonce ce qu’il qualifie de «loi la plus régressive depuis 40 ans». «Cette loi raciste et xénophobe restreint le droit au séjour, accentue considérablement la répression, s’attaque au droit d’asile, au droit du sol, aux étrangers malades, aux étudiants non européens, au regroupement familial, est-il écrit. L’attaque contre l’hébergement d’urgence, le durcissement de l’accès aux prestations sociales dont les allocations familiales et les aides aux logements vont jeter des familles à la rue ou dans les bras de marchands de sommeil, particulièrement les femmes migrantes.»
Dans la manifestation parisienne, qui s’est élancée à 15 heures place de la République, plusieurs milliers de personnes sont venues marcher contre une «loi raciste». «Nous demandons le retrait pur et simple de la loi. Nous sommes venus en France pour travailler, nous ne sommes pas des délinquants», lâche ainsi Mariama Sidibé, porte-parole du collectif de sans-papiers de Paris, une ancienne aide à domicile désormais à la retraite. «C’est une loi raciste, faite pour nous maintenir dans la précarité et nous criminaliser, cette mobilisation n’est qu’un début», renchérit Aboubacar Dembélé, du collectif des travailleurs sans-papiers de Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne).
«C’est ignoble de voter une loi pareille»
Dans le même temps, en déplacement à Caen, le nouveau Premier ministre Gabriel Attal a été interpellé par une passante au sujet de cette même loi. «C’est ignoble de voter une loi pareille, a lancé cette femme devant les caméras de BFMTV. On a tellement besoin de ces gens-là [des personnes immigrées, ndlr], qui sont utiles dans plein de métiers.» «Je ne dis pas le contraire, mais il faut à la fois être plus clair sur nos règles […], et mieux intégrer les personnes qui ont vocation à rester en France car, vous avez raison, on en a besoin», a répondu le Premier ministre, admettant l’existence de «situations qui sont humainement dramatiques». «Mais laisser des personnes venir sur notre sol en sachant très bien que l’on ne pourra pas les accueillir, ce n’est pas leur rendre service non plus.»
Grande absente des manifestations ce dimanche, la CGT est à l’origine d’un autre rassemblement prévu le 21 janvier. Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, est signataire de l’appel des 201, publié dans Mediapart et l’Humanité le 10 janvier, «dénonçant les marchands de haine et les mécaniques de division sans fin de notre société» et visant à «faire primer l’essentiel : le rassemblement et la solidarité». «L’idée c’est de rassembler tous ceux qui sont choqués par cette loi écrite sous la dictée de l’extrême droite et de se placer sur le plan de l’humanité vis-à-vis de l’autre et de l’attachement aux valeurs fondamentales de la République : l’universalité des droits, le maintien du droit du sol», a expliqué Sophie Binet, interviewée par RMC. La CFDT, Unsa, FSU et des personnalités comme Jacques Toubon sont également signataires du texte.
Tribune
Cette autre mobilisation aura lieu quatre jours avant le passage de la loi devant les Sages. Lors des vœux annuels au président de la République, Laurent Fabius, le président du Conseil constitutionnel, a directement critiqué Emmanuel Macron en déclarant que «le Conseil constitutionnel n’est ni une chambre d’écho des tendances de l’opinion, ni une chambre d’appel des choix du Parlement, il est le juge de la constitutionnalité des lois». Le gouvernement compte depuis l’adoption de la loi immigration sur une censure partielle du texte afin que les éléments introduits pour obtenir les voix de la droite et faire passer le texte au Parlement – notamment grâce aux voix de l’extrême droite – en dépit de la majorité relative.
Mise à jour : à 17 h 25, ajout de déclarations de porte-parole dans la manifestation parisienne.