Les histoires commencent souvent par une fin : un départ, une chute ou une rupture. Pour Hanaë Bossert, la narratrice de Ma Tonkinoise, tout débute à la mort de sa grand-mère, Gisèle. Elle y découvre un monde inconnu. Le rituel de ses origines. On entend des phrases – dans le premier des quatre épisodes – du genre «Ne pas avoir les codes pour enterrer correctement sa grand-mère» ou «Les rituels qui s’ajoutent à la peine.» Hanaë Bossert est la narratrice mais elle n’est pas la seule à être perdue. Sa mère et sa tante le sont également. Elles ne parlent pas la langue ; elles ne connaissent pas les codes.
Gisèle était une orpheline vietnamienne. Elle a épousé un militaire français. A quel âge ? Personne ne sait vraiment. Elle était mineure. Elle a modifié sa date de naissance – c’était courant à l’époque – pour entrer dans les clous de la loi. Gisèle vivait dans un appartement chaleureux à Marseille. Des repas, de la musique et des discussions sans fin. Est-ce qu’elle racontait tout ? Hanaë Bossert avait le droit à son petit surnom, Coco. La grand-mère avait pour souhait de rejoindre son mari au cimetière Saint-Pierre de Marseille. Elle avait acheté une parcelle. Changement de direction dans les derniers moments de sa vie. Elle décide se faire incinérer à la pagode de Marseille, revenir à ses racines bouddhistes et vietnamiennes. Pourquoi ?
Transmission, héritage et intégration
On embarque dans la mémoire enfouie. Hanaë Bossert cherche des réponses sur le passé des siens au sens large. La colonisation, la guerre, la violence, les mariages de filles mineures et l‘exil. Hanaë Bossert installe une ambiance dans le podcast. Les voix sont multiples. Famille, historiens, chercheurs et Vietnamiens exilés. «Ensemble, ils et elles éclairent les amnésies laissées dans l’histoire, décortiquent les conséquences des métissages et font résonner de nouvelles voix pour mieux déconstruire les clichés sur les asio-descendants, explique l’équipe de Louie Média. A travers son histoire personnelle, c’est l’histoire de la colonisation française en Indochine que l’on redécouvre, et de la guerre d’indépendance qui peine à exister dans nos mémoires collectives.»
Ma Tonkinoise est une quête personnelle ou tout le monde s’y retrouve. Ceux qui ont un lien avec l’Indochine, forcément, mais pas seulement. Cette histoire parle à ceux qui ont connu de loin ou de près la colonisation, les départs ou l’exil. Elle raconte la transmission, l’héritage et l’intégration. Hanaë Bossert a été «désarçonnée» après le départ de Gisèle. La douleur de perdre sa grand-mère, et le passé qui revient en pleine poire comme un boomerang. La Marseillaise met des mots doux sur les silences, les injustices et les douleurs. Une ode pour ceux qui restent.
Ma Tonkinoise d’Hanaë Bossert pour Louie Media. En quatre épisodes pour la saison 7 du podcast Injustices, dont Libé est partenaire, disponible sur Apple Podcasts, Spotify, Castbox, Youtube, Soundcloud, Deezer…