Les restes d’une escarmouche récente jonchent la rue Pierre-Brossolette, à Gravelines (Nord). Il est 2 heures du matin dans la nuit du mercredi 9 au jeudi 10 juillet, l’air sent encore la lacrymo. Sur le trottoir, devant le garage d’une maison coquette, une masse noire est avachie. L’épave d’un canot pneumatique dégonflé. L’équipe de l’association Utopia 56, en maraude, n’est pas surprise. «Les exilés devaient porter le bateau sur leurs épaules, pour le mettre à l’eau, et les policiers les ont dispersés», suppose Célestin Pichaud, coordinateur de l’association dans le Dunkerquois.
Les interceptions de ce type sont des classiques. Il remonte dans sa camionnette, chargée jusqu’à la gueule de vêtements secs et chauds, pour les naufragés trempés qu’il pourrait rencontrer sur sa route. La ville est paisible, comme si rien ne s’était passé. Elle est un spot apprécié pour les départs des small boats vers la Grande-Bretagne. Le canal de l’Aa se jette ici dans la mer : les embarcations sont mises à l’eau en amont, sans être repérées. Il n’y a plus un chat, la pleine lune éclaire les animations de plage. Seul un vigile passe, avec son chien muselé et hargneux. Ainsi vont les nuits sur le littoral des Hauts-de-France.
1 200 gendarmes et policiers
Le temps est au beau, propice aux traversées, après plusieurs jours avec une forte houle. Dans la journée, les bénévoles d’Utopia ont mené leur action de prévention aux arrêts d’autobus à Loon-Plage et à Grande-Synthe, près des camps des exilés. «Nous leur