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La très inégale répartition sociale des élèves dans l’enseignement privé et le public

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Les écoles et collèges privés sous contrat sélectionnent surtout des enfants venant de milieu social aisé, d’après les nouvelles données finalement communiquées par le ministère de l’Education.
(Julien Guillot)
publié le 18 octobre 2022 à 15h35

Les chiffres ne sont guère surprenants, mais viennent objectiver ce phénomène. Il existe une grande différence de mixité sociale entre l’enseignement public et les établissements privés sous contrat, aussi bien pour les collèges que les écoles primaires. Le ministère de l’Education a publié mercredi dernier, après une longue obstruction (1), le fichier détaillé de l’Indice de position sociale (IPS) par établissement de l’année scolaire 2021-2022. Cet indice est fabriqué à partir des catégories socioprofessionnelles des parents d’élèves. Plus ce chiffre est élevé, plus les élèves d’un établissement viennent d’un milieu social favorisé. Sur les 500 premiers collèges en termes d’IPS, 65 % sont de type privé sous contrat, contre 3 % pour les 500 derniers.

Le constat d’une moindre mixité sociale dans les collèges privés avait déjà été documenté par des chercheurs, mais on s’aperçoit, au vu des nouvelles données, que le constat est le même pour les écoles primaires (maternelles et élémentaires).

Il existe également des disparités par académie, avec en tête du classement les zones de Paris et Versailles. A l’opposé, les départements d’outre-mer arrivent derniers, tout juste précédés par les académies de Lille et d’Amiens.

Au sein même de chaque académie, on s’aperçoit que les disparités sont encore plus visibles qu’au niveau national. Par exemple, dans la zone de Dijon, dont l’indice est proche de la moyenne française, 80 % des écoles publiques ont un IPS inférieur à 110, tandis que 70 % des écoles privées ont un IPS supérieur à 110.

Le fossé social entre public et privé est encore plus net dans l’académie de Paris, dans laquelle 80 % des écoles publiques ont un Indice de position sociale inférieur à 130, tandis que 80 % des écoles privées ont un IPS supérieur à 130. L’an dernier, le chercheur Julien Grenet pointant dans Libé un privé parisien n’accueillant que 3 % d’élèves défavorisés, contre 23 % dans le public.

Pour combler ces disparités, certains chercheurs avaient émis la suggestion que les établissements privés sous contrat, dont les professeurs sont payés par l’éducation nationale, soient contraints d’une manière ou d’une autre d’accepter davantage d’élèves défavorisés. Mais le ministre Pap Ndiaye, qui considère la mixité scolaire comme «très clairement une des priorités», ne s’est pour l’instant jamais prononcé sur le sujet.

(1) Les données ont été publiées après une longue procédure enclenchée par le journaliste Alexandre Léchenet : requête auprès de la Commission d’accès aux documents administratifs (Cada) puis recours auprès du tribunal administratif pour contraindre le ministère à la transparence au niveau de ses données.