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Polémique

Le portail d’Auschwitz copié à l’entrée d’un skate park en Savoie, le créateur plaide «une blague douteuse»

Le portique en ferraille a été retiré quelques jours après l’inauguration du skate park mi-septembre à Saint-Jean-de-Maurienne, révèle le «Dauphiné Libéré». Mais le profil du créateur, habitué à reprendre des références nazies, interroge.

La forme du portail d'entrée du camp de concentration Auschwitz a été copiée par le créateur d'un skate park à Saint-Jean-de-Maurienne. (Omar Marques/Getty Images. AFP)
Publié le 07/11/2024 à 19h24

Au départ, il y a une grande idée : construire le skate park indépendant le plus imposant du pays. A la fin, il y a une réalisation au goût plus que discutable, voire franchement antisémite, et une polémique que les pouvoirs locaux essaient d’éteindre tant bien que mal. Le skate park de Saint-Jean-de-Maurienne, en Savoie, a dû faire démonter le portique en ferraille qui lui servait d’entrée quelques jours après son inauguration mi-septembre parce qu’il reprenait l’esthétique de celui du camp de concentration d’Auschwitz, rapporte le Dauphiné Libéré. «Nous avons réglé le problème au plus vite. Il n’y a pas de sujet, on ne peut pas prendre le risque de blesser des gens», a assuré Philippe Rollet, maire (sans étiquette) de Saint-Jean-de-Maurienne, auprès de France 3.

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Publiée par Skateparks de France sur Samedi 14 septembre 2024

Une maladresse ? Le problème est que la personne à l’origine de l’édification du lieu, Jérémy Durand, a, en guise d’explication, publié un long post sur son compte Facebook le 15 octobre, dans lequel il dévoile que l’idée de départ était de reprendre l’inscription du camp d’Auschwitz, «Arbeit macht frei» («le travail rend libre») pour la remplacer par «Skaten macht frei» («le skateboard rend libre»). «Une blague douteuse […] que nous n’aurions jamais dû faire», concède Jérémy Durand, affirmant vouloir «s’excuser, par la même occasion, auprès des personnes qui ont été sincèrement offusquées par le manque de jugeote dont nous avons fait preuve». Interrogé par France 3, il argumente tout de même qu’il ne faut «pas confondre utilisation de l’iconographie nazie et antisémitisme».


«Skate park de l’horreur»

Sauf que l’activité de Jérémy Durand sur les réseaux sociaux et dans les colonnes d’un fanzine interrogent également. Pointé par le blog Balance ton antisémite, le fanzine Versus, qui traite essentiellement de skateboard, fait référence à plusieurs occasions à la Seconde guerre mondiale ou au nazisme. A commencer par les deux «S» du mot Versus écrit sur une planche de skate, dont la graphie rappelle beaucoup celle des sinistres SS. Cette même graphie était présente sur le dernier caractère du portique démonté, qui ne proclamait pas finalement pas «Skaten macht frei» mais «Yachting club mauriennais».

Thierry Laporte, président de l’association Skate and Create qui a aussi participé à la création du skate park, évoque une «provocation» qui serait habituelle chez les skateurs et dans la musique métal. A propos du portique, il dit que «le but était de montrer une forme de revanche de la vie sur cet épisode de l’histoire […] dans un endroit où tout le monde peut venir, quelles que soient ses convictions, ses origines ou sa religion.»

Selon Balance ton antisémite, en s’excusant, Jérémy Durand a aussi donné «des arguments complotistes» et cumulé «les attaques antijuifs contre Gabriel Attal et le monde politique». Le blog demande en outre «la fermeture de ce skatepark de l’horreur». Toujours interrogé par France 3, Thierry Laporte explique que «si certains ont été blessés, je peux le comprendre, mais je ne peux pas supporter qu’on entache les centaines de bénévoles qui ont travaillé sur ce projet». Contacté par Libération, le parquet d’Albertville n’avait pas répondu au moment de la publication de l’article.