Les femmes esclaves des diplomates
Plusieurs domestiques de diplomates d’ambassades parisiennes les accusent d’esclavage moderne. Pour la première fois, elles témoignent. «Libération» a enquêté sur les conditions de vie et les violences qu’elles disent avoir vécues au domicile de leurs employeurs, protégés par leur immunité diplomatique. Ceci est le premier volet de notre série sur «les femmes esclaves des diplomates».
Des longs mois passés au 38, avenue d’Iéna, dans le XVIe arrondissement de Paris, Maria et Hanna (1) ont conservé certains souvenirs précis. Des odeurs, des bruits, des scènes qu’elles ont vécues, réminiscences de ces moments où elles étaient retenues captives. Elles sentent encore parfois cette émanation de bakhour, un mélange de bois de santal, d’agar, d’épices et d’huiles qui brûlait quotidiennement dans l’appartement. Ou aperçoivent subrepticement ces majestueux platanes qui se dressaient face aux fenêtres du bel immeuble de cinq étages en pierres blanches où elles ont séjourné, seuls témoins de la vie extérieure.
Les autres volets
De leur arrivée à Doha en octobre 2015 jusqu’au 13 octobre 2021 – date de leur fuite à Paris –, les deux domestiques philippines affirment avoir été esclaves de Fahad Ahmed Jassim Al Hamar, ambassadeur adjoint du Qatar en France de 2021 à 2023, proche de la famille royale et actuel ambassadeur en Equateur. Maria l’accuse également de viols répétés commis à son domicile parisien, avenue d’Iéna, d’une période allant du 17 avril au 11 juillet 2021. Elle a déposé plainte le 16 décembre de la même année pour des faits de viols, de traite des êtres humains et d’abus de confiance ; Hanna a fait la même démarche le 17 décembre 2021 pour traite des êtres humains et abus de confiance. Les deux plaintes ont été classées sans suite le 13 mai 2022 en raison de l’immunité diplomatique dont bénéficie le mis en cause, et aucune investigation n’a été menée.
Passeport immédiatement confisqué
Les deux femmes se son