A l’occasion de la Journée nationale de la laïcité le 9 décembre, l’institut Ifop a réalisé un sondage sur les Français musulmans et la laïcité, financé par une future chaîne de télévision, Elmaniya.tv, qui se définit comme «laïque et humaniste», à destination des populations franco-arabes. Il apparaît que les Français musulmans ont une religiosité beaucoup plus forte que le reste de la population. Sociologue spécialiste de l’islam, Vincent Geisser analyse les principaux résultats de ce sondage. Selon le chercheur du CNRS, les milieux musulmans français ont intégré les principes de la laïcité, même s’ils s’insurgent contre son instrumentalisation identitaire et sécuritaire.
Dans le sondage de l’Ifop, 66% des Français musulmans se disent croyants et religieux (c’est-à-dire pratiquants). Ce chiffre vous surprend-il ?
Au-delà de ce chiffre, je relève que le fait de se dire musulman est devenu quelque chose de réel, d’incarné dans la société française. Il y a vingt ans, peu de personnes se définissaient comme tel. Il était plutôt fait référence à une origine géographique ou migratoire : les individus revendiquaient davantage leur filiation avec l’immigration africaine, maghrébine ou turque. Quel que soit leur degré de pratique religieuse, les personnes interrogées n’hésitent plus désormais à mettre en avant leur appartenance à l’islam. L’identité musulmane s’est, si je puis dire, «détabouisée». Toutefois, je n’exclus pas non plus qu’il y ait, ce que j’appelle un effe