L’eau monte dans les caves de l’impasse Denans à Cannes. Dehors, lundi 23 septembre, il vient de tomber 30 à 40 mm entre 7 h 20 et 7 h 50. La pluie s’abat sur la ville, s’accumule dans la rue, s’engouffre dans le sous-sol. Les occupantes des lieux, trois femmes parviennent à s’en échapper. Elles viennent de s’extirper des eaux et de leurs logements indignes. C’est la mairie qui alerte le parquet de Grasse et la police nationale. Le propriétaire des trois caves est interpellé. «Ça pourrait être un marchand de sommeil», indique le maire LR, David Lisnard, en conseil municipal lundi 30 septembre. La garde à vue de l’homme est désormais levée. «L’enquête [pour «soumission d’une personne vulnérable à des conditions d’hébergements indignes», selon Nice-Matin, ndlr] se poursuivant en préliminaire», indique à Libération le parquet de Grasse.
La boue était encore dans la rue et les pompiers à leurs opérations de pompage que la ville de Cannes ouvre déjà sa maison des associations : 24 personnes sinistrées sont accueillies. La structure d’urgence rassure, réchauffe, reloge. Concernant les rescapées des caves, «trois personnes sont venues d’une habitation [du quartier] de République, de nationalité étrangère, deux Philippines et une réfugiée ukrainienne», précise David Lisnard lors du conseil municipal : «Donc des personnes en précarité. Elles vivaient en sous-sol contre un montant qu’elles nous ont indiqué.» D’après Nice-Matin, les loyers s’élevaient à 450 euros par mois, encaissés par un dentiste cannois de 39 ans.
«Biens peu recommandables»
«C’est très fréquent. Et ce sont toujours les mêmes types de population qui en sont victimes, pointe Zohra Briand, responsable du Droit au logement dans les Alpes-Maritimes, citant des cas similaires à Antibes. Il s’agit souvent de femmes seules avec enfants, de personnes qui ne maîtrisent pas bien le français ou de personnes handicapées. Elles sont accaparées par leur travail et les enfants, elles n’ont pas le temps, elles ont plus de mal à faire valoir leurs droits.»
Hasard du calendrier, une semaine exactement après les inondations, la question du logement indigne surgit au conseil municipal de Cannes. Lundi, la ville a adopté une convention avec la CAF pour identifier les appartements insalubres. «Un outil supplémentaire qui vient à notre service pour identifier l’habitat dégradé, se félicite David Lisnard. Depuis le début de l’année 2024, une centaine de contrôles d’immeubles a été effectuée en habitat, qui se sont traduits pour quatre d’entre eux par un arrêté d’interdiction d’habiter. Les marchands de sommeil, on essaie de les identifier, de les inquiéter.» Une habitante a fait passer une question au maire. A l’écrit, elle indique avoir «quelques doutes sur certains propriétaires» qui mettent «à la location des biens peu recommandables» dans le secteur République, ce quartier balayé par les eaux. «On met tout ce qu’on peut mettre en place», répond David Lisnard.
Après leur arrivée dans la structure d’accueil, la ville de Cannes a «proposé un logement» aux trois femmes. Elles ont «décliné», indique la commune. L’une a trouvé refuge chez son compagnon, les deux autres sont hébergées par des amis. Elles ne retourneront pas dans les caves de l’impasse Denans.