«Ici, il n’y avait rien.» D’un geste du bras, l’architecte Iwona Buczkowska pointe à la fois la station RER du Blanc-Mesnil, ouverte en 1980, le parking en contrebas et la cité Pierre-Sémard. Aussi appelé «la Pièce Pointue», l’ensemble installé sur un terrain de six hectares attire immanquablement l’œil par ses toits anguleux perçant le ciel, sa façade en mélèze que le vieillissement a foncée, ses fenêtres d’un rouge vif par endroits, tout simplement sa singularité au milieu de bâtiments classiques. En 1978, malgré sa «trouille immense», la femme au léger accent polonais, aujourd’hui âgée de 68 ans, avait réalisé le premier croquis de ce qui allait devenir la plus grande cité construite en bois de France. Un destin presque accidentel pour ces immeubles qui plongent ce coin de Seine-Saint-Denis, situé à vingt minutes de RER du cœur de Paris, dans une ambiance de petit village de montagne.
Mais à peine deux décennies après la fin du chantier, au moment où le bois trouve une place de choix dans le secteur de la construction, 130 des 254 logements sociaux du site sont voués à la démolition, après avoir été rachetés par le promoteur privé Cogedim. Attaqués à plusieurs endroits par des infiltrations d’eau ces dernières années, ces appartements sont jugés non sauvables par l’actuel bailleur, Seine-Saint-Denis Habitat (SSDH), qui gère les lieux depuis 2005. En se promenant ici et là dans la cité, on peut observer des taches d’humidité apparentes et des toits rafistolés