Entre la nécessité de remédier à la crise du logement et l’impératif de préserver l’environnement, le gouvernement avait arbitré lors du projet de loi de finances (PLF) 2024 en faveur du second objectif. D’abord en portant à 4 milliards d’euros le montant des aides à la rénovation énergétique des logements. Puis en recentrant le prêt à taux zéro (PTZ, un emprunt sans intérêt réservé aux primo-accédants modestes) sur l’acquisition d’un appartement plutôt que d’une maison individuelle, au nom de la lutte contre l’artificialisation des sols.
Mais la sévérité de la crise du logement, qui empêche les jeunes ménages d’accéder à la propriété, a conduit l’exécutif à revoir ses priorités. Comme le Premier ministre, Michel Barnier, l’avait annoncé lors de sa déclaration de politique générale, le prêt à taux zéro sera donc «étendu sur tout le territoire pour les primo-accédants afin de faciliter l’accession à la propriété». Une dépense dont le chiffrage n’est pas encore connu.
Suppression d’un avantage fiscal «pousse-au-crime»
Autre mesure très attendue en faveur des locataires, la suppression d’un avantage fiscal dont bénéficiaient les loueurs en meublé non professionnels : 200 millions d’euros d’économies sont attendus de cette mesure qui conduirait à taxer plus fortement la plus-value réalisée à la revente du bien. C’est un nouveau coup de boutoir contre ce qu’on appelle la «niche fiscale Airbnb», jugée responsable de l’aggravation de la crise du logement car, en incitant fiscalement à la location de courte durée, elle assèche le marché locatif classique dans les villes et territoires attractifs. Et une potentielle victoire pour les élus de gauche et de la majorité, qui ont bataillé l’an passé pour réduire les nombreux avantages fiscaux «pousse-au-crime» dont bénéficient les loueurs de meublés.
«La suppression de cet avantage fiscal – le double amortissement du régime réel au moment de la plus-value – figurait dans l’article 4 de notre proposition de loi que le Sénat avait écrasé, donc nous nous réjouissons que Bercy la reprenne à son compte», réagit auprès de Libération le député socialiste Iñaki Echaniz, co-rapporteur de cette proposition de loi avec la députée Ensemble pour la République Annaïg Le Meur. Concernant le calendrier législatif, l’élu a bon espoir que le texte, adopté en première lecture avant d’être suspendu par la dissolution, soit examiné en commission mixte paritaire «d’ici novembre». «En parallèle, nous allons déposer des amendements communs avec Annaïg Le Meur pour réformer le régime réel», sachant que 70% des propriétaires à ce régime ne paient pas d’impôts, et «pour un bonus fiscal pour la location longue durée», ajoute celui qui veut faire du logement une priorité pour ce budget.
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Mais cette priorité a un prix : les crédits alloués à MaPrimeRénov sont inscrits en baisse d’un milliard d’euros par rapport à 2024. Distribuée par l’Agence nationale de l’habitat, cette subvention pour aider les propriétaires modestes à faire des économies d’énergie en renforçant l’isolation de leur bien ou en remisant leur vieille chaudière fait les frais d’un recalibrage plus large des aides écologiques – le Fonds vert, qui finance des projets en faveur de la transition écologique dans les territoires, perd aussi au change –, même si, au total, les crédits de la mission Ecologie augmentent de 2,8 milliards d’euros.
Hausse des crédits en faveur de la lutte contre le sans-abrisme
Globalement, les moyens de la mission «Cohésion des territoires», qui regroupe les ministères de Catherine Vautrin (Partenariat avec les territoires et Décentralisation) et de Valérie Létard (Logement et Rénovation urbaine) sont maintenus. Ils devraient même s’afficher en légère hausse, passant de 23,5 milliards d’euros en 2024 à 23,7 milliards en 2025. Sachant que 72% de l’enveloppe est absorbée par le versement de l’aide personnalisée au logement (APL), qui devrait grimper à 17 milliards d’euros, un record. Le gouvernement assure que les crédits en faveur de la lutte contre le sans-abrisme (plan Logement d’abord) seront même augmentés et que «les capacités d’accueil du parc d’hébergement d’urgence seront maintenues à un niveau élevé de 203 000 places» en 2025, soit une dépense de 3 milliards d’euros.
En revanche, les bailleurs sociaux ont, encore une fois, échoué à obtenir que le gouvernement revienne sur la réduction de loyer de solidarité (RLS) qui a ponctionné leurs ressources d’une dizaine de milliards d’euros depuis sa mise en place en 2018. C’est d’autant moins d’habitations à loyer modéré (HLM) qui sortiront de terre pour loger ceux qui n’ont pas les moyens de le faire dans un parc privé devenu inabordable. Le rendement de la RLS «sera maintenu en 2025 à son niveau de 2024», a tranché Bercy. C’est toujours 1,3 milliard d’euros de pris.
Mise à jour vendredi à 11h30 : rectification concernant l’avantage fiscal dont bénéficient les loueurs de meublés touristiques de type Airbnb et ajout de la réaction du député PS Inaki Echaniz.