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Reportage

«On mérite un logement décent» : à Marseille, les habitants de la Renaude à l’abandon

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Dans cette cité du 13e arrondissement vouée à la démolition, treize familles occupent encore les barres d’immeuble délaissées. Malgré des conditions de vie de plus en plus difficiles, elles refusent les propositions de relogement du bailleur social vers «des quartiers livrés au trafic de drogue».
Construit dans les années 60, la Renaude, un grand ensemble de 110 logements répartis en plusieurs barres, est vouée à la démolition. (Patrick Gherdoussi/Divergence pour Libération)
par Stéphanie Harounyan, correspondante à Marseille
publié le 3 mars 2024 à 13h21

Yamina Amara s’est assise sur une chaise dans un coin du salon et passe en revue le chaos. Dans son appartement du troisième étage, cité de la Renaude dans le 13e arrondissement de Marseille, l’eau n’a pas épargné grand-chose. Malgré le soleil qui tape désormais et les fenêtres grandes ouvertes, les plafonds comme les murs, cloqués et bouffés par l’humidité, n’ont toujours pas séché ce mercredi, trois jours après le déluge qui s’est abattu sur Marseille et sur l’appartement de Yamina.

Le sol du salon est occupé par un matelas et des serviettes, qui ont absorbé le gros de l’inondation. Sous la partie la plus abîmée du plafond, la septuagénaire et son frère Nordine, qui vit avec elle, ont installé une collection de bassines pour récupérer les gouttes qui s’échappaient la veille encore. Nordine a compté, il a jeté vingt-cinq seaux le premier jour. Yamina, elle, tourne en rond dans son appartement, ouvre les placards et mesure les dégâts. «Toutes mes robes orientales, mes couvertures, les jouets de mes petites-filles… Je me suis mariée ici, j’ai eu quatre enfants qui se sont mariés ici, c’est cinquante ans de vie qui partent à la poubelle…»

Sanitaires cassés, fils électriques coupés

En mai, déjà, la pluie avait provoqué de sérieux dégâts. La locataire avait prévenu le bailleur, Habitat Marseille Provence (HMP), mais rien n’avait été fait, raconte-t-elle. Le bailleur y mettrait même de la mauvaise volonté, assurent Yamina et ses voisines : construit dans les années 60, la Renaude, un grand ensemble de 110 logements r