Pour Clélia, 18 mois, et Nayéli, 8 mois, c’est l’heure des petits pots. Loïc nourrit la première en répondant à nos questions, en ping-pong avec Zoé qui fait chauffer les biberons, puis s’arme à son tour d’une petite cuillère et tente de slalomer entre les grands sourires du second bébé, ravi de l’agitation qui règne dans le salon. A première vue, c’est une scène de ménage tout ce qu’il y a de plus ordinaire. Si ce n’est que Loïc et Zoé ne se connaissaient pas il y a six mois. Derrière les grandes vitres d’une ancienne usine du XXe arrondissement de Paris, la petite entreprise familiale bien huilée est en fait une coloc un peu particulière, réservée aux familles monoparentales.
Avant d’arriver ici, Zoé, 38 ans, habitait déjà le quartier. Elle était enceinte. «Je savais que j’allais être maman solo», raconte-t-elle, le père n’étant pas dans l’équation, «et que j’allais devoir quitter mon appartement parce que la proprio le reprenait». A l’époque «étudiante en photojournalisme, au chômage et auto-entrepreneuse», elle ne «cochai[t] aucune case». Malgré l’urgence, elle ne retrouve rien autour. «J’ai visité des studios, mais quand les gens voyaient que j’étais enceinte ils ne voulaient plus me les louer, on me disait que ça allait être trop petit pour deux.» Dans l’attente d’un logement social depuis cinq ans, elle relance la mairie, écrit des courriers… Rien. «L’assistante sociale m’avait conseillé de déménager hors d’Ile-de-France, s’ind