Menu
Libération
Road trip

Making-of: des journalistes dans le «convoi de la liberté», quand les rôles s’inversent

La pandémie de Covid-19 en Francedossier
La rédactrice et le photographe de «Libération» ont embarqué dans le cortège parti de Nice mercredi. Trois jours sous un feu roulant de questions.
En escale à Avignon, le 10 février. (Frédéric Pasquini/ Hans Lucas pour Libération)
par Mathilde Frénois et Frédéric Pasquini
publié le 11 février 2022 à 17h41

Il y a deux manières de couvrir un convoi : le suivre ou le vivre. Ce sera la deuxième option. Sur leur route pour Paris, les manifestants ont pu apercevoir un photographe et une rédactrice lever le pouce. Jamais plus de cinq minutes. Libération a choisi l’immersion de Nice à Paris, dans huit véhicules, sur mille kilomètres. Cette expérience s’était pourtant mal engagée. On avait raté le départ du convoi à Nice, rattrapant notre retard en embarquant dans la voiture d’un journaliste de LCI !

Pousser une portière, c’est entrer dans une sphère privée. Le hasard des rencontres nous a guidés. On a parlé du système éducatif et de santé avec Lou, papoté des différences culturelles entre Chine et France avec Antoine, célébré la mémoire de Johnny avec Alain et Nadège, tchatché boxe avec Bruno. Et on a trouvé des points communs. Lou vendait pour Johnny ses tee-shirts et ses médailles à l’entracte des concerts, peut-être celle que Nadège porte autour du cou. Sylvain et Corinne n’avaient jamais mis le pied sur une manif. Tous prônaient les médecines traditionnelles et rejetaient le compteur Linky. On a parlé des heures : des vaccins et du pouvoir d’achat, de tout et de rien. Bien plus qu’une interview sur un rond-point.

Parfois, les rôles s’inversent. Les reporters ne posent plus les questions, ils sont gentiment pressés de répondre. «Vous êtes vaccinés ? En tant que journaliste, vous en pensez quoi du pass ? Et Macron, vous croyez qu’il sera au second tour ?» Un échange s’engage, souvent un débat, une seule fois on ressentira de la défiance. On nous a demandé à des dizaines de reprises combien on gagnait, si les articles étaient «coupés» ou «censurés», comment travaillaient les «journalistes de plateau». Et surtout : «Est-ce que vous avez des nouvelles de Julian Assange ?»

On a donc fait la route de Fréjus à Paris. Et on a levé la barrière du scepticisme, des deux côtés. Ce making-of a été rédigé à bord d’un camping-car entre Macon et Dijon. Sous l’œil de Lou.