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«Mères en cavale» : un podcast pour lever le voile sur les violences incestueuses poussant à une vie de clandestinité

Dans ces trois épisodes diffusés par Louie Media, et dont «Libération» est partenaire, la journaliste Romane Brisard a recueilli le témoignage de mères de famille qui, pour protéger leurs enfants de la violence de leur père, ont décidé de prendre la fuite.
Le podcast «Mères en cavale» est diffusé par Louie Media depuis mardi 15 octobre. (Johanne Licart/Louie Media)
publié le 17 octobre 2024 à 5h29

Avertissement

Cet article relate des faits de violences incestueuses et peut choquer.

«Je n’avais aucune autre option que de fuir avec ma fille pour la protéger.» Tamara est la mère d’Anna. En 2018, elle a décidé de partir en cavale avec son enfant, alors que la justice venait de confier la garde de la fillette au père, en dépit des accusations de violences incestueuses le visant. C’est cette histoire que cette femme raconte dans le podcast Mères en cavale, diffusé par Louie Media depuis le 15 octobre. Trois épisodes de quarante-cinq minutes chacun, réalisés par la journaliste Romane Brisard, pour lever le voile sur l’inceste, un «crime le plus souvent sans témoin ni trace flagrante», et le traitement judiciaire dont il fait l’objet, poussant parfois des mères à la clandestinité pour protéger leurs enfants. Trois femmes, Sandra, Sarah et Tamara racontent leur histoire. Des récits intimes, parfois ahurissants de violence, mais aussi touchants, quand l’espoir d’une reconstruction semble se dessiner.

Pour Sandra, les premières alertes remontent au jour où son fils revient le coude luxé d’une balade au marché avec son père. Des «violences éducatives ordinaires» qui deviennent récurrentes. La mère de famille finit par demander le divorce, l’obtient, mais voit revenir ses enfants des séjours chez leur père «cernés, pâles, affamés». Jusqu’à ce jour de l’été 2022, quand sa fille de 4 ans refuse d’enlever ses vêtements et d’aller se doucher. Et ces mots, crus, lorsque sa mère lui demande pourquoi. «Parce que papa est encore venu le soir et m’a touché la zézette.» Ses trois enfants font le même récit, poussant Sandra à installer un mouchard dans le doudou de sa fille pour accumuler des preuves. Quand elle extrait l’appareil et lance l’enregistrement, elle «entend l’enfer» : «Je devais faire des pauses car je n’en pouvais plus. En pleine nuit, les pas, la porte qui s’ouvre, les bruits de couette, ma fille qui dit “ça fait mal, je veux pas”, les pleurs de douleur, et moi en train d’écouter le viol de mon enfant.» Tamara, elle, découvre les parties génitales mutilées de sa fille au retour d’un séjour chez son père. Aux urgences pédiatriques, un signalement est effectué, déclenchant le début d’une enquête.

Semblant de normalité

Mais, comme pour Sandra, cela ne signe pas la fin d’un calvaire pour sa fille. Car la justice, dans ces dossiers, semble aux abois. Incapable de protéger les enfants, mettant en doute leur parole, ou jugeant qu’ils sont manipulés par leur mère. Comme le rappelle le podcast, la Civiise, dans ses travaux sur l’inceste, a mis en évidence que seule une plainte pour violence incestueuse sur dix aboutissait à une condamnation. Pire, les violences ne sont reconnues que dans 2% des cas quand le père accuse la mère de manipulation, invoquant souvent le concept contesté d’«aliénation parentale».

Chacune des témoins a, à un moment, décidé de prendre la fuite, prenant le risque d’être poursuivie pour «non-présentation d’enfant». Une vie de cavale, précaire, où il s’agit de recréer un semblant de normalité et, comme le dit Tamara, «faire fonctionner les choses de façon un peu miraculeuse» grâce à la solidarité des amis ou de la famille. Certes, «Anna n’a pas une vie parfaite, mais elle peut grandir, s’épanouir favorablement», raconte sa mère. Qui conclut : «Mon objectif est de tenir jusqu’à ce qu’Anna ait 18 ans, pour que personne ne puisse l’obliger à voir la personne qui l’a violée.»

Les trois épisodes de Mères en cavale ont été diffusés les 15, 16 et 17 octobre dans Passages, le podcast d’histoires vraies de Louie Media, dont Libération est partenaire. L’enquête s’est poursuivi dans Libé, avec Romane Brisard en janvier avec deux nouveaux articles.
Episode 1 : Episode 2 : Episode 3 :

Si le lecteur audio s’affiche mal, retrouvez les épisodes ici.

Passages, le podcast d’histoires vraies de Louie Media, est disponible sur toutes les applications : Apple Podcasts, Spotify, Deezer, Castbox et grâce au flux RSS.