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Nuit de la solidarité : le nombre de sans-abri recensés à Paris en baisse par rapport à 2020

La pandémie de Covid-19 en Francedossier
En mars, près de 2 900 personnes en situation de rue ont été décomptés par les bénévoles. Parmi elles, 13% de femmes, selon le rapport rendu lundi par l’Atelier parisien d’urbanisme.
Des bénévoles sont allés à la rencontre des personnes sans abri de la capitale le 30 janvier 2020 dans le cadre de la Nuit de la solidarité. (Michael Bunel/Le Pictorium pour Libération)
publié le 9 novembre 2021 à 15h46

Un recensement géant en plein couvre-feu. Les 25 et 26 mars 2021, 358 équipes de bénévoles de la Nuit de la solidarité, organisée par la mairie de Paris, ont parcouru les rues de la capitale, les gares, les salles d’attente de 13 hôpitaux de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris, les stations de métro et RER, des parkings, des parcs, des campements… pour compter le nombre de sans-abri. Et pour cette quatrième édition, le nombre de personnes en situation de rue est en baisse par rapport à celles recensées l’année précédente, selon des chiffres dévoilés lundi par l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur).

Ce sont ainsi 2 829 personnes sans solution d’hébergement qui ont été décomptées, soit une baisse de 21% par rapport au recensement effectué lors de la Nuit de solidarité de 2020, bien avant le premier confinement. En janvier 2020, 3 601 individus avaient été recensés. «Cette diminution s’explique notamment par la mise à l’abri de personnes en campements dans le nord-est parisien et par un contexte marqué par une forte augmentation du nombre de places d’hébergement et de mise à l’abri par rapport aux années antérieures», avance l’Apur. Depuis mars 2020, 43 000 places d’hébergement d’urgence ont été créées par le gouvernement. La ministre du Logement, Emmanuelle Wargon, a annoncé en septembre qu’il était «nécessaire de mettre définitivement fin à la gestion dans l’urgence et de construire une politique structurelle, avec une visibilité sur le long terme, en lien avec les associations» et a donc décidé de les maintenir au moins jusqu’en mars 2022, portant à 200 000 les places d’hébergement à disposition.

68 mineurs recensés

Si le nombre de sans-abri rencontrés est en baisse, leur profil et leur situation géographique ont connu peu de changements. Dans le détail, 2 112 personnes ont été comptées dans les rues de Paris (contre 2 099 en 2020) ; 191 dans les gares (231 en 2020) ; 144 dans les stations de métro et RER intramuros (234 en 2020) ; 140 dans les bois de Boulogne et de Vincennes (160 en 2020) ; 123 sur les talus du périphérique (69 en 2020) ; 72 dans les campements dits de famille (133 en 2020) ; 22 dans les salles d’attente des urgences (60 en 2020) ; 17 dans les parkings (31 en 2020) ; 6 dans les parcs et jardins (53 en 2020) et deux dans les espaces ouverts du bailleur social Paris Habitat (7 en 2020). Contrairement à l’année dernière, Paris intramuros ne comptait pas de camp de migrants, selon le rapport de l’Apur. En 2020, 324 personnes y avaient été décomptées. Autre enseignement sur la localisation des personnes sans solution d’hébergement : elles sont particulièrement présentes dans les arrondissements du centre et de l’est parisien.

13% des personnes recensées lors de cette quatrième Nuit de la solidarité sont des femmes (14% en 2020). Les personnes en situation de rue sont âgées en moyenne de 41 ans, comme l’an dernier. 68 mineurs figurent dans le décompte, contre 74 en 2020. 13% des personnes rencontrées étaient âgées de moins de 25 ans et 18% avaient plus de 55 ans. Une grande majorité des personnes rencontrées étaient seules (77%), «14% étaient en groupes de cinq personnes ou plus et 7% étaient en couple ou famille.»

Le rapport rendu par l’Apur fait également état d’une population souvent éloignée des solutions d’accompagnement. 69% des personnes en situation de rue ont fait savoir aux bénévoles qu’ils n’appelaient plus le 115, le numéro du Samu social, parce qu’elles ne recevaient généralement pas de réponse ou anticipaient une absence de réponse. Mais aussi pour ne pas être séparées de leur animal de compagnie, en raison de solutions non adaptées aux familles et aux groupes ou après avoir vécu de mauvaises expériences dans des centres d’hébergement, notamment.

Une Nuit nationale de la solidarité en janvier 2022

Seulement 38% des répondants sont suivis par un travailleur social. Plus de la moitié (52%) ont une adresse pour recevoir leur courrier. Pour l’accès aux soins : seuls 42% des répondants ont dit avoir vu un médecin dans les six mois et 39% des individus recensés disposent d’une couverture maladie. Ils sont toutefois 39% à estimer être en bonne santé et 14% en très bonne santé. «Au contraire, 20% estiment être en mauvaise santé et 5% en très mauvaise santé». Près de la moitié des personnes recensées «pense passer la nuit dans la rue comme en 2020», «61% sont sans logement personnel depuis plus d’un an comme en 2020». Chez les plus de 55 ans, près d’un répondant sur deux a affirmé être sans logement personnel depuis plus de cinq ans. Les «deux-tiers sont sans ressource financière ou vivent de la mendicité comme en 2020». 45% des répondants ont déclaré être arrivés à Paris sans logement et 32% des personnes recensées ont indiqué ne pas avoir été hébergées.

Parmi les besoins principaux exprimés par les répondants, on retrouve le logement, l’hébergement, l’accès à un emploi et à la nourriture, et la possibilité de prendre une douche. Quant à l’impact du Covid-19 sur leur quotidien, «une majorité de répondants souligne que la crise n’a pas eu d’impact sur leur situation personnelle […] ou sur leur accès aux services et aux aides qui leur sont destinés (38%)». Pour l’Apur, certaines personnes interrogées «ont pu vouloir souligner le fait que leur situation n’a que peu évolué : ils et elles étaient sans solution de logement avant la crise et se trouvent toujours dans une situation précaire une année plus tard». 26% des personnes rencontrées ont fait état d’un sentiment d’isolement, d’anxiété ou de stress du fait de la crise. 13% ont estimé qu’elle avait eu un impact négatif sur leur accès à solution de mise à l’abri, 11% pour accéder à l’aide alimentaire ou encore 10% pour accéder à des produits d’hygiène.

Cette année, un décompte des personnes en situation de rue a aussi été organisé à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) «à titre expérimental». Résultat : douze hommes ont été recensés et tous étaient isolés. Cette expérimentation annonce l’ouverture sur la banlieue francilienne de la cinquième Nuit de la solidarité, qui aura lieu les 20 et 21 janvier 2022. Une Nuit nationale de solidarité sera organisée au même moment dans les communes de plus de 10 000 habitants.