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«Page TikTok», rencontres «avec des femmes en France» : à l’Ofpra, les troublantes questions sur «l’occidentalisation» des demandeurs d’asile afghans

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Migrants, réfugiés... face à l'exodedossier
«Vous faites quoi sur votre portable ?», «Vous aimeriez faire des rencontres avec d’autres femmes ici ?»… Pour espérer obtenir le statut de réfugié, les exilés afghans sont régulièrement interrogés sur leur adhésion à de supposées valeurs françaises. A l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, l’embarras est visible.
Lors d'une manifestation en soutien aux exilés et demandeurs d'asile, à Pantin en avril. (Myriam Tyrler/Hans Lucas. AFP)
publié le 17 février 2023 à 6h00

Quand il est convoqué à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) en juin 2022 pour un entretien, Y.M. sait que le moment est important : l’officier qui se trouve en face de lui doit décider si oui ou non il pourra vivre légalement en France. Cet Afghan de 39 ans pense y décrire les raisons qui l’ont poussé à demander l’asile. Quand il vivait près de Mehtarlâm, à l’est de Kaboul, Y.M. tenait un commerce. Régulièrement, les talibans y entraient pour voler des produits, surtout des boissons énergétiques et des biscuits. Un jour, l’homme issu d’une famille d’agriculteurs s’y oppose. Selon son récit, il est agressé après avoir dénoncé les pillards. Par peur d’être tué, il prend seul la fuite, sans sa femme et ses cinq enfants, direction le sud de la France, où il débarque en juillet 2021 après plusieurs mois de périple.

Mais rapidement, l’entretien, dont Libération a pu lire le compte rendu, prend une drôle de tournure. Plutôt que de s’attarder sur la nature des menaces reçues, l’officier de protection semble interroger Y.M. sur l’adéquation de son mode de vie avec de supposées valeurs françaises. «Vous ne voulez pas vous créer une page TikTok ?», «vous postez sur Facebook ?», «vous regardez quoi sur YouTube ?», «vous faites quoi […] sur votre portable ?» interroge-t-il. Il s’attarde aussi sur la question religieuse : «Votre mère, votre femme, votre fille, […] est-ce qu’elles pourraient sortir seules ou travailler, sans porter le vo