Il est 5 h 30, jeudi. Dans sa commune des Mauges – zone rurale du sud-ouest du Maine-et-Loire –, Lucie (1) distribue les journaux locaux aux abonnés. On y relate la première action, menée la veille, par 150 «agriculteurs en colère» devant un Super U du nord du département. «Je suis à 400 % d’accord avec eux. Mais je ne peux pas me permettre de louper deux heures de ménage. Depuis le mois de janvier dernier, je ne me tire plus de salaire», raconte cette quasi-trentenaire.
Cette mère de deux enfants est à la tête d’une exploitation de veaux de boucherie. «Ce ne sont pas mes veaux, précise-t-elle. Ils sont en intégration et appartiennent à Denkavit.» Une entreprise leader dans son domaine – 264 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2022 – dont le siège national est aussi situé à une soixantaine de kilomètres à vol d’oiseau de chez Lucie. Celle-ci jongle entre les emplois pour s’en sortir. Un coup la livraison des journaux, un coup les veaux, un coup le ménage. Un jour, un sage lui a dit : «Tu peux me dire quel est le couillon qui irait emprunter presque 500 000 € pour gagner 0 € à la fin du mois ?»
Billet
Ce type, c’est Guy Sérès. Un agriculteur gersois de 80 ans ayant fondé, en 1992, le Samu social agricole. En 2020, cette association venant en aide aux paysans a connu en Anjou un nouveau souffle. Essentiellement implantée dans l’Ouest du pays, elle propose autant un soutien moral qu’une aide juridique ou matérielle. Sa quinzaine de membres affirm